AŞK

Turquie

* "amour" en Turc

" Je t'aime "
Quelques précisions sur cette langue

Le turc est une langue parlée principalement en Turquie (75 millions d’habitants) et en Chypre du Nord. Elle est la langue officielle de la République de Turquie et langue officielle, en partage avec le grec de la République de Chypre, pays membre de l’Union Européenne.

Langue agglutinante, écrite en alphabet latin depuis 1928, elle appartient à la famille des langues turques, ensemble regroupant plus de 200 millions de locuteurs dans le monde, notamment dans les républiques turcophones de l’ancienne URSS (Azerbaïdjan, Turkménistan, Ouzbékistan, Kirghizistan, Kazakhstan), mais dans de nombreux pays où vivent des minorités turcophones, notamment en Bulgarie, en Grèce (concentré en Thrace occidentale), en Bosnie-Herzégovine, au Kosovo, dans la partie nord de l’île de Chypre (République turque de Chypre du Nord), dans le nord de l’Irak (surtout à Kirkouk), en Macédoine, en Roumanie et en Allemagne.
Il existe entre les différentes langues de la famille turque d’importantes différences phonologiques, grammaticales ou lexicales.

Quelques références littéraires et cinématographiques

TURQUIE

La littérature turque est extrêmement riche, mais les traductions françaises ne remontent qu’aux années 1900 et longtemps des auteurs majeurs n’ont pas fait partis du circuit des traductions. L’installation à Paris de l’écrivain turc Nedim Gürsel a contribué, par son enseignement de la littérature turque à la Sorbonne et ses articles dans des revues comme Anka, à faire connaître les auteurs de la littérature contemporaine de son pays. Au XIXe siècle la littérature classique se renouvelle et cède la place, sous l’influence d’une ouverture vers l’Occident, à une nouvelle inspiration. Apparaissent alors des ouvrages appartenant à des genres littéraires nouveaux, roman, théâtre, nouvelle, mémoires, essais et critiques, inconnus jusqu’alors dans la littérature turque. Parmi les auteurs remarqués de cette époque, pour la nouvelle et surtout le roman, citons Halit Ziya Usakligil (Bleu et noir, L’amour interdit) et Mehmet Rauf (Septembre), un premier roman psychologique. Quand j’ai découvert Istanbul il y a plus de trente ans, je me suis vraiment sentie aux portes de l’Orient. Traverser le Bosphore, rêver depuis les terrasses du Café Pierre Loti, d’où l’on jouit d’une vue panoramique sublime sur la Corne d’Or, sont des instants de vie indicibles. La magie du décor s’empare de votre imaginaire, il vous fait remonter le temps, celui de la grandeur de Byzance, de Constantinople, où palais et mosquées, hérissées de coupoles et de minarets, rappellent la magnificence de l’Empire ottoman. La situation géographique de la ville, plus grand comptoir dès le Moyen Âge, en a fait l’une des cités les plus convoitées par les grands de ce monde. Sur l’une des tables du café Pierre Loti, deux jeunes étudiants lisaient l’un, un recueil de Nazim Hikmet, l’autre un ouvrage de Yachar Kemal. Je leur ai demandé qui étaient ces auteurs ? Ils m’ont répondu l’un est notre plus grand poète contemporain, l’autre notre plus grand romancier. Quand les traductions de ces auteurs ont paru en français, je me suis souvenue de cette belle conversation et à l’occasion de mes recherches pour écrire les lignes qui vont suivre j’ai pu constater que les spécialistes de la Turquie littéraire considèrent ces auteurs, encore aujourd’hui, comme des figures emblématiques de la littérature turque.

 

ROMAN

 

SABAHATTIN ALI (1907-1948)

Poète, romancier et journaliste Sabahattin Ali publie ses premières nouvelles dans les années trente, époque où la liberté de parole dans la presse était loin, comme c’est le cas encore aujourd’hui, d’être libre. À la suite de ses textes critiquant Atatürk, l’écrivain est accusé de propagande et emprisonné. Pris pour cible par les nationalistes turcs après la parution du Diable qui est en nous en 1943, sa vie devient chaotique. Il est assassiné en 1948 dans la forêt d’Istranka alors qu’il tentait de fuir vers la Bulgarie : il avait 41 ans ! En Turquie, son engagement a jeté une ombre sur son œuvre et, dans le contexte de la Turquie d’aujourd’hui, le succès (meilleure vente en Turquie 75 ans après la mort de son auteur) de la Madone au manteau de fourrure n’est pas anodin !

La madone au manteau de fourrure (Kürk Mantolu Madonn)

Trad. Jean Descat (éd. Le Serpent à plume, 2007)

Il s’agit d’une histoire d’amour dans le Berlin cosmopolite, moderne et très vivant des années 1920. Publié en 1943, ce livre est tombé dans l’oubli jusqu’en 1998, année où un éditeur d’Istanbul décide de le republier. Depuis, d’année en année, les ventes et les traductions ne cessent d’augmenter et le succès est au rendez-vous ! Cette belle histoire commence dans un musée de Berlin où Raif est fasciné par la ressemblance entre une visiteuse et un tableau qu’il admire « La Madone au manteau de fourrure » d’Andrea del Sarto. La jeune femme s’appelle Maria Puder, il fait sa connaissance et ils vont vivre un amour passionné. A la mort de son père, Raif rentre en Turquie et les échanges épistolaires des deux amants se poursuivent, mais à travers ces liens tissés, se cache un secret. Ce roman devrait être prochainement adapté au Cinéma.

 

Le diable qui est en nous

(éd. Le Serpent à plumes, 2008)

Si le cœur du récit s’articule autour d’une histoire d’amour, ce roman paru en 1940 évoque : « avec beaucoup de force le marasme intellectuel et moral de la génération qui vécut la succession de Mustafa Kemal Atatürk et la montée des périls en Europe. » (Timur Muhidine)

Pour financer ses études à Istanbul Ömer accepte un boulot qui l’ennuie. A la fois lucide sur les événements du monde et rêveur, comme on peut l’être à son âge, il n’a guère d’illusions sur son avenir. Quand il rencontre Macide il tombe amoureux, deviennent amants, décident de vivre ensemble et croient à leur bonheur. Mais, rattrapé par leur précarité matérielle, la vie devient pesante et Ömer a du mal à faire les sacrifices que lui impose la vie de couple. Ses mauvaises fréquentations l’incitent à commettre des actes, qu’ils condamnent dans son for intérieur, et sa relation amoureuse se dégrade au fil du temps. Sa vie semble partir en lambeaux et les beaux rêves des premiers jours se sont bel et bien envolés. Ömer fait un amer constat, chaque être à sa part sombre et lumineuse : il est seul responsable de ses actes et comprend que le coupable c’est la part du diable qui est en lui et le pousse à céder à ses pulsions.

 

YACHAR KEMAL (1923-2015)

Grande figure littéraire turque Yachar Kemal, né dans une famille de paysans kurdes, a été le plus populaire des écrivains de sa génération. Romancier, nouvelliste et journaliste il est l’auteur de trente-cinq romans. Chantre de l’Anatolie profonde, il a su au fil de sa plume décrire une Turquie rurale, méconnue par l’intelligentsia le plus souvent occidentalisée qui découvrira à travers son œuvre une autre Turquie, misérable, conservatrice et religieuse.  A quatre ans le jeune Kemal assiste sous ses yeux à l’assassinat de son père à la mosquée. L’année suivante il perd l’usage de l’œil droit et sous le choc de ces deux événements, il reste bègue jusqu’à 12 ans. Quand, quelques années plus tard, sa mère lui demande de venger son père, comme le veut la tradition en tuant son assassin, Kemal refuse. Dès l’âge de neuf ans il travaille pour aider sa mère comme berger, ramasseur de coton, gardien de nuit, maçon, employé dans une bibliothèque. Il lit avec ferveur, découvre les grands de la littérature mondiale (Cervantès, Stendhal, Garcia Marquez…), écrit des poèmes et publie ses premières nouvelles à vingt ans. Emprisonné pour propagande communiste, il est ensuite engagé comme journaliste au quotidien Cumhuriyet. Marié à une intellectuelle polyglotte, qui traduira ses romans et sera emprisonnée elle aussi à plusieurs reprises, le couple n’aura de cesse de lutter pour faire entendre la voix des humbles. Cet étonnant autodidacte, écrivain engagé et militant de gauche, sera emprisonné pour avoir écrit un article Le ciel noir de la Turquie, qui dénonce le sort réservé aux Kurdes. Mais sa condamnation déclenche une mobilisation internationale qui lui évite de se retrouver sous les verrous. Pressenti à plusieurs reprises pour le prix Nobel, dont le premier lauréat turc sera Orhan Pamuk en 2006, Yachar Kemal a laissé une œuvre puissante couronnée par de nombreux prix littéraires.

Mèmed le Mince

Trad. Güzin Dino (éd. Gallimard 1979)

C’est son œuvre la plus célèbre. Il s’agit d’une véritable épopée, où l’on suit le parcours chaotique et lumineux de Mèmed le Mince, un garçon pauvre qui se révolte contre l’injustice et l’attitude arrogante d’Abdi, l’agha du village (riche propriétaire terrien), qui oppresse, affame et asservi les villageois. Dans ce petit village, niché sur un plateau des contreforts du Taurus, rares sont ceux qui se rebellent contre le pouvoir tyrannique de l’agha. Le jeune Mèmed tente par tous les moyens de lui résister et il devient la bête noire d’Abdi. Quand Mèmed apprend que l’agha à l’intention de marier son neveu à la belle Hatché, sa bien-aimée depuis toujours, il décide de s’enfuir avec elle. L’agha, furieux et humilié, se lance à la poursuite du jeune couple… Ainsi débute l’histoire de Mèmed le Mince, un paysan pauvre. Rattrapé, Mèmed tue le neveu et blesse l’agha. Banni de la société il devient « Bandit d’honneur », les riches le craignent, les pauvres l’aiment. Il n’hésite pas à user de ruse, de violence et à aller jusqu’au meurtre, pour sauver la vie des faibles, leur honneur et leurs droits. A travers ses exploits, qui font de lui une figure légendaire à travers toute l’Anatolie, l’écrivain développe les valeurs auxquelles il croit et au fil des pages il nous livre un roman de révolte sociale.  Aujourd’hui encore les bardes anatoliens chantent l’épopée de Mèmed le Mince.

La saga de Mèmed le Mince

Trad. Münevver Andaç et Güzin Dino (éd. Quarto, Gallimard, 2011)

Ce volume contient Mèmed le Mince, Mèmed le Faucon, le retour de Mèmed le Mince, le dernier combat de Mèmed le Mince

 

ZÛLFÛ LIVANELI

Né en 1946 Zûlfû Livaneli est l’une des personnalités de la vie culturelle et politique en Turquie. Musicien, romancier et réalisateur, il s’est fait connaître en tant qu’auteur, compositeur de musiques de films et interprète d’un très grand nombre de chansons. Ses chansons, qui diffusent un message de paix, ont notamment été jouées par le prestigieux orchestre symphonique de Londres. Observateur des soubresauts de la société turque, ses prises de position après le putsch de l’armée en 1971, lui ont valu plusieurs mois de prison. Ambassadeur de bonne volonté auprès de l’UNESCO (1996-2016) et ardent défenseur de l’amitié gréco-turque, l’écrivain a cofondé avec le compositeur Mikis Theodorakis l’association pour l’amitié gréco-turque. Ses livres, La Maison de Leyla, Délivrance, Une saison de solitude sont traduits et publiés en France chez Gallimard.

Délivrance

Trad. Shirine Melikoff (éd. Gallimard, 2010)

Dans ce roman, où l’on suit trois destins qui révèlent les fractures de la société turque d’aujourd’hui (le combat des femmes, des minorités, les multiples contradictions, la tolérance religieuse…), on comprend à quel point la société est déchirée entre le mythe de l’Occident et de l’Orient, entre tradition et modernité. Un jour, non loin du cimetière, Meyrem est retrouvée ensanglantée et confuse, sans qu’elle sache ou n’ose expliquer ce qui lui est arrivée. Tous pensent qu’elle a été victime d’un viol. Reconduite chez elle, la famille considère que le plus important n’est pas ce qui lui est arrivé, mais que l’honneur de la famille soit souillée : Le destin de Meyrem est scellé, elle est enfermée.

Après ses études à Harvard Irfan Kurudal, appartenant à la société huppée d’Istanbul, enseigne à l’université et apparaît souvent à la télévision. Il fait partie de la jet set stambouliote et son statut est d’autant plus privilégié qu’il a épousé une femme riche. Un jour Irfan, qui n’a que quarante-quatre ans, fait le bilan de sa vie : elle lui semble insipide et dépourvue d’intérêt. Aussi décide-t-il de larguer les amarres, de prendre le large : il loue un bateau et disparaît en mer Egée. Enfin Djemal – qui vient de terminer son service militaire dans la région où se déroulent des combats avec les Kurdes du PKK – rentre dans son village où il accueilli comme un héros. Un jour, sa famille n’hésite pas à lui demander de faire disparaître sa cousine Meyrem…

 

AHMET ALTAN

Né en 1950 à Istanbul où il réside toujours, Ahmet Altan est un auteur célèbre en Turquie et ses livres sont traduits dans plusieurs langues. Journaliste – aux prises de paroles publiques qui fâchent, que ce soit dans ses romans ou dans le journal d’opposition Taraf qu’il fonde et dont il fut le rédacteur en chef (2007-2012) – Ahmet Altan est accusé d’avoir participé au putsch manqué du 15 juillet 2016. L’écrivain est incarcéré en septembre 2016 à la prison de Silivri, non loin d’Istanbul. Le 16 février 2018, il est reconnu coupable – ainsi que cinq autres personnes dont son frère, le journaliste Mehmet Altan, d’avoir tenté de « renverser l’ordre prévu par la Constitution de la République de Turquie » – et condamné à la réclusion à perpétuité. Deux de ses romans Comme une blessure de sabre (2000) et L’Amour au temps des révoltes (2008) ont été publié chez Actes Sud qui a lancé une pétition demandant la libération de l’écrivain dissident.

L’Amour au temps des révoltes

Trad. Alfred Depeyrat (éd. Actes Sud, 2008)

Ce roman flamboyant – à la mesure des bouleversements de l’époque, de la modernité de l’Occident et des rêves de l’Orient – peut se lire en écho au premier roman d’ Ahmet Altan, Comme une blessure de sabre. L’histoire se déroule à Istanbul à la veille de la contre-révolution du 31 mars 1909. Alors que le sultan voit les dernières heures de son règne approcher, Hikmet Bey, fils du médecin personnel du sultan, est délaissé par sa femme Mehpare Hanim qui a eu pour premier époux l’influent Cheik Effendi. Après une tentative de suicide, il reprend goût à la vie et pour le consoler son père lui « offre » Hediye.  Istanbul, la Sublime Porte, la cité aux mille couleurs, se trouve soudain peinte en rouge sang : les rues sont devenues le théâtre de toutes les violences et pendant les émeutes de nombreux officiers sont massacrés par une partie de leurs propres soldats fanatisés par des religieux.  L’Histoire est en marche, on assiste au démantèlement de l’Empire Ottoman, la victoire politique et militaire revient aux Unionistes au détriment du Sultan : la République turque est officiellement proclamée en octobre 1923, mettant ainsi fin à ce qui restait de l’Empire ottoman, et Mustapha Kemal Pacha est le premier président de la République de Turquie. Ce livre foisonne de personnages qui vivent fastueusement dans leur villa et leur palais entre Salonique, Istanbul et Paris, tiraillés entre deux mondes que l’on qualifiera, pour simplifier, d’occidental et d’oriental.  A travers amour, complot, pouvoir et splendeur, on suit le destin d’un peuple en marche vers la modernité.

 

ORHAN PAMUK

Prix Nobel de littérature (2006)

Né en 1952 à Istanbul dans un milieu aisé, Orhan Pamuk, premier écrivain Turc à recevoir le prix Nobel, passe son enfance dans une maison qui domine le Bosphore.  Elève au Robert College, le prestigieux lycée américain d’Istanbul, il étudie l‘architecture et le journalisme, rêve de devenir peintre puis, au grand dam de sa famille, décide à vingt-deux ans de vivre exclusivement de sa plume.  Profondément marqué et attaché à Istanbul, sa ville natale apparaît comme un personnage à part entière dans ses romans où il décrit le plus souvent les déchirements de la société turque entre l’Occident et l’Orient. Couronnés par de nombreux prix littéraires, ses romans sont traduits dans une cinquantaine de langues. Parmi ses principaux ouvrages citons : La Maison du silence (1983), La Vie nouvelle (1994), Livre noir (1995), Mon nom est rouge (prix du Meilleur Livre Etranger, 1998), Neige (2002), Le Musée de l’Innocence (2008), le Romancier naïf et le romancier sentimental (2010), Cette chose étrange en moi (2014). Orhan Pamuk qui confie à propos de son pays : « Il n’y a pas de futur sans liberté de parole », intervient régulièrement dans la presse internationale sur des questions sensibles touchant la Turquie.

Le Musée de l’Innocence

éd. Gallimard, 2008

Istanbul dans les années 1970. L’histoire se déroule sur les rives du Bosphore à une époque où existent encore les mariages arrangés entre gens de la bonne société. Kémal, un jeune bourgeois d’une trentaine d’années, est sur le point de se marier avec Sibel mais, peu avant ses fiançailles, il tombe éperdument amoureux de sa cousine Füsun, qui est loin d’être insensible à ce beau parti ! Pour la voir, sous le prétexte de lui donner des cours de mathématiques, il la retrouve tous les jours dans l’appartement inoccupé de sa mère. Les amants y vivent des moments intenses voire torrides, mais Kémal ne se décide pas pour autant à renoncer à épouser Sibel. Lors de la cérémonie, très huppée de leurs fiançailles, Füsun, qui fait partie des convives, quitte soudainement les lieux et Kémal pense ne jamais la revoir. A cet instant il comprend son amour pour elle et n’aura de cesse de la chercher.  Déjà pendant leur liaison, il avait commencé à garder des objets lui appartenant – une boucle d’oreille oubliée lors de leurs premiers ébats amoureux – et, telles des reliques, ces objets vont au fil du temps constituer un musée intimiste destiné à revivre ces instants de bonheur fugitifs à la manière d’une Madeleine de Proust. Perdu, profondément malheureux, Kémal se décide à tout avouer à Sibel, à rompre ses fiançailles et peu à peu il se retrouve isolé de ses amis et du clan de la jet set stambouliote. Kémal finit par retrouver Füsun mais, mariée à son ami d’enfance Feridun, la douleur des retrouvailles est d’autant plus forte. Ils passeront leur vie à se frôler, à s’attendre… Kémal fait tout pour la voir régulièrement, son amour désormais platonique l’incite à collectionner de manière obsessionnelle un objet – touché, porté, aimé par elle – dérobé à chacune de leurs rencontres. Ainsi se constitue le musée intime de cet amour sacralisé. Cette passion contrariée et tragique, est un grand roman d’amour nostalgique où Orhan Pamuk traduit avec une grande sensibilité, le désir, le poids de l’absence et la puissance du rêve éveillé. Si vous allez visiter Istanbul, sachez que l’écrivain a véritablement crée le Musée de l’innocence, où l’on voit la robe à fleurs, un ticket de cinéma, des centaines de mégots de cigarettes qui, écrasés différemment, révèlent une violente dispute, un instant harmonieux, le jour où (le filtre est tâché de rouge) Füsun savourait une glace à la cerise etc. Comme Flaubert l’écrivain dit avoir besoin de voir l’objet pour le décrire dans le roman, d’où cette collection constituée au fil de l’écriture du livre. A propos de cet insolite collection Orhan Pamuk confie : « Kemal vit une expérience très forte, un amour fou, qui l’isole de ses amis. Ces derniers se moquent de lui, Kemal réagit et développe sa théorie : si tu as assez de force pour exposer fièrement la tragédie de ton cœur brisé, alors tu transformes ta défaite en gloire. Ce musée de l’Innocence développe l’idée, qui m’est chère, que tout drame intime, au fond, mérite son musée. » C’est grâce à l’argent du prix Nobel en 2006, que l’écrivain a eu l’idée de faire un musée qui a ouvert ses portes en 2012.

Cette chose étrange en moi

Trad. Valérie Gay-Aksoy  (éd. Gallimard, 2017)

Lors d’un interview à Paris Match Orhan Pamuk explique : « Pour la première fois de ma vie, en effet, mon héros n’a rien à voir avec moi. Je voulais un homme qui ressemble à tous les hommes. Je ne fais pas parler Mevlut, mon personnage, je fais voir la ville par ses yeux. »    Ce roman nous entraîne dans la saga d’une famille sur deux générations et, à la manière d’un reportage, l’auteur montre l’incroyable évolution d’Istanbul pendant une quarantaine d’années. Si les mariages arrangés existent entre riches dans les milieux aisés on les retrouve aussi dans les milieux pauvres des plaines et des montagnes d’Anatolie. Mevlut vient d’un monde rural où il est impossible de rencontrer des filles avant le mariage et où parler de sexe est tabou. Mevlut, vendeur ambulant de yaourt et de boza comme son père, a été fasciné par le regard de Samiha, une jeune fille rencontrée lors du mariage d’un cousin. Il se met à rêver : il lui écrit des lettres d’amour, mais c’est Rayiha qui les reçoit, il tente même d’être poète quand il lui écrit : « Vos beaux yeux m’ont foudroyé ». Ballotté par la vie, Mevlut continue à rêver, à aimer, à travailler, à souffrir, et du courage il en a ! La ville que l’écrivain décrit ici n’est pas celle des palais ou des beaux quartiers, le lecteur déambule dans la mégapole turque, se glisse au cœur des quartiers pauvres où vivent les milieux défavorisés, des quartiers éventrés par les nouveaux tracés routiers et des collines bidonvilles rongées par une urbanisation galopante.

 

ASLI ERDOGAN

Née en 1967 à Istanbul Asli Erdogan est une romancière et journaliste, dont la presse internationale a parlé à de nombreuses reprises depuis le 17 juillet 2016, jour où elle a été arrêtée – après le coup d’Etat manqué – comme Ahmet Altan, pour avoir militée pour les droits de l’homme et s’être montrée opposante au régime. Grande voix de la littérature turque contemporaine, physicienne de formation, elle a travaillé au Centre européen de recherches nucléaires de Genève. Libérée le 29 décembre 2016, elle vit aujourd’hui en Allemagne et craint les autorités turques, son procès n’étant pas terminé. En 2018 Asli Erdogan est lauréate du « Prix Simone de Beauvoir », pour la liberté des femmes. L’Europe a déjà récompensé plusieurs fois son courage et son combat pour les droits de l’homme avec le prix Tucholsky en 2016, le prix de la fondation européenne de la culture, le prix Bruno Kreisky et le prix de la paix Erich-Maria-Remarque en 2017. Plusieurs de ses œuvres traduites en français sont publiées chez Actes Sud Les Oiseaux de bois, Le Bâtiment de pierre, Le silence même n’est plus à toi ou encore aux éditions Meet Je t’interpelle dans la nuit.

 

 Les Oiseaux de bois

Trad. Jean Descat (éd. Actes Sud, 2009)

L’auteur confie : « Un souvenir est un pont qui se tend vers le passé, un pont de bois fragile, prêt à s’écrouler. »  Ce recueil de cinq nouvelles met essentiellement en lumière des destins de femmes victimes d’un monde cruel, elles ont en commun, une profonde solitude et souffrance. Des histoires où la maladie, la mort, la violence humaine apparaissent comme une fatalité, voire « une tragédie que l’on se transmet de génération en génération. »  Un an après la mort de sa bien-aimée, un homme quitte Istanbul et erre de par le monde. Sur les rives du lac Léman, il feuillette ses carnets qui lui rappellent son amour perdu. Six femmes, qui ont fait le mur pour s’échapper d’un sanatorium où elles sont enfermées, cheminent sur un sentier montagneux et, à peine vêtues d’une chemise de nuit, elles se dirigent vers un torrent à l’écume bouillonnante pour accomplir un étrange rituel. Croient-elles qu’elles peuvent encore exister et séduire même si la mort s’approche inexorablement ? Surprises par de beaux jeunes hommes qui troublent leur bain : depuis si longtemps elles sont privées d’amour… La Turquie apparaît en filigrane derrière ce sanatorium où douleurs physiques, souffrances psychologiques et morales se côtoient.  Dans « le captif » une femme enceinte, face à la prison où son mari est retenu prisonnier, relit les lettres censurées de son époux. Elle les garde précieusement et, tôt un matin, elle se poste devant la porte de la prison afin de l’apercevoir : « chaque matin, à son réveil, elle pensait au bébé qu’elle avait dans le ventre, en se disant qu’à ce moment-là, il était lui aussi en train de penser à elle. »

Le mandarin miraculeux

Trad. Jean Descat (éd. Actes Sud, 2006)

Sous le titre d’une ancienne légende chinoise (celui qui s’ouvre aux sentiments devient vulnérable), l’auteur nous livre un bref récit de l’exil et de la perte. Au cœur de la nuit, une jeune femme turque promène son mal être, sa noirceur dans les rues interlopes de Genève.  Etrangère en Turquie elle l’est aussi en Suisse où elle s’est installée pour fuir les interdits de son pays. Genève lui apparaît indifférente, comme tant d’autres villes de par le monde, au sort de ses habitants venus d’ailleurs.  L’héroïne a perdu ses repères, son œil droit et son amour. Auprès de Sergio, son amant qui est parti, elle a connu des instants de bonheur. La femme fantomatique qu’elle est devenue, écrit le soir dans les cafés, déambule dans les rues et reprend soudain vie quand elle arpente le quartier de la Jonction, à la confluence de l’Arve et du Rhône, qui la renvoie à son histoire d’amour. Mais les souvenirs ravivent les blessures, elle a besoin d’aimer mais doit-t-elle se laisser surprendre par l’amour, les sentiments ? Elle n’arrive pas à se construire une nouvelle identité, à être tout simplement une femme libre dans un monde libre.

 

NOUVELLE

NEDIM GÜRSEL

Né en Turquie en 1951, Nedim Gürsel est l’auteur d’une quarantaine d’ouvrages, romans, nouvelles, récits de voyage, essais. Lauréat de plusieurs prix littéraires, dont celui de l’Académie de la langue turque en 1976 pour son premier récit Un long été à Istanbul, il occupe une place majeure dans la littérature de son pays et son œuvre est traduite dans plus d’une vingtaine de langues. Il écrit en turc et en français, vit à Paris où il a été directeur de recherche au CNRS, Professeur à la Sorbonne et à l’École des langues orientales.  En 1980, l’écrivain est contraint à l’exil en France suite à un coup d’Etat militaire : la junte ayant censuré son roman Un long été à Istanbul pour « offense aux forces armées », alors que paradoxalement le livre avait obtenu le Prix de l’Académie de langue turque. En 1983 son court roman La Première femme (éd. Points 2008), est censuré pour « offense à la morale publique », comme Les filles d’Allah (2008) qui a fait l’objet d’un procès. Le prix de la liberté d’expression décerné chaque année par l’Union des Editeurs Turcs lui a été attribué en 2009. Son roman Le fils du capitaine est paru au Seuil en 2016.

Le Dernier Tramway

Trad. Anne-Marie Toscan du Plantier (éd. Seuil 1996)

Un recueil de nouvelles sur l’exil et l’amour

Balcon sur la Méditerranée

Trad. Esther Heboyan et Timur Mihiddin (éd. Seuil, 2003)

C’est en tant qu’auteur de nouvelles que Nedim Gürsel s’est affirmé (Le prix de la meilleure nouvelle lui a été décerné en 1990 par Radio France Internationale) et qu’il s’est fait connaître en Turquie comme en France, en Allemagne et en Italie. Dans ce recueil de treize nouvelles, les héros sont pour l’essentiel des hommes qui ont en commun l’exil, un thème récurrent de l’auteur, et leur amour des femmes. Loin d’Istanbul, ils ressentent la nostalgie de leur pays d’origine, un déracinement voire un vide que rien n’arrive à combler. Ils cherchent auprès des femmes – à travers leur écoute, leur complicité, leur tendresse, leur ardeur, leur désir, leur sensualité – un remède à leur vie, à leur mal être. Mais leurs relations amoureuses sont complexes, parfois violentes et souvent suivies de désespoir.

Etreintes dangereuses

Trad. Jean Descat (éd. Le Passeur, 2018)

Peut-être est-ce la peur – de voir s’évanouir à jamais l’amour et la liberté dans son pays où sévit aujourd’hui une sévère censure morale – qui a inspiré à l’écrivain ce recueil de nouvelles, défiant tout tabou moral ou religieux ? A propos des femmes  Nedim Gürsel confie : « Les femmes qui sont entrées dans ma vie étaient dures au mal mais impitoyables. À la fois victimes et bourreaux. […] Je ne vous apprendrais pas que l’âme féminine est aussi insondable qu’un ciel couvert, même si elle semble transparente comme les ciels de Tiepolo. » Vous l’aurez compris, dans cet ouvrage Nedim Gürsel explore la vie amoureuse sous ses multiples facettes, de l’amour, sous l’emprise de la passion, au désamour. Ces récits – empreints de volupté, de passion, de douleur de la séparation et d’amours impossibles – ont pour décor le golfe d’Izmir au soleil couchant, une gare d’Anatolie, une chambre à Antalya avec une jeune fille Kurde aux yeux verts venant d’une « très ancienne tribu. »

 

 

POESIE

 Voici trois ouvrages qui vous permettront de découvrir la poésie turque des origines à aujourd’hui en passant par la grande époque classique.

Anthologie de la poésie turque du XIIIe au XXe siècle

édition et traduction par Nimet Arzik (collection Blanche, Gallimard, 1968)

Les premières joutes poétiques commencent avec les bardes – qui, de manière spontanée, chantent leur peine et leur joie – les poètes errants, les mystiques et ceux qui se disaient fous… Plus tard naît la poésie classique, celle du Divan, une poésie de cour, au langage sophistiqué, précieux, et très élaboré, influencée par la poésie arabe. A l’aube des années 1900, la poésie se renouvelle avec Nâzim Hikmet et sa forme moderne du « vers libre »

Dix-sept poètes turcs contemporains

éd. L’Harmattan, 2009

Des poèmes sur l’amour, l’épopée, la solitude ou encore des poèmes engagés de Ahmet Oktay, Cevat Capan, Özdemir Ince, Fikret Demirag, Ataol Behramoglu, Güven Turan, Mehment Taner, Gülseli Inal, Sina Akyol, – Ayten Mutlu, Tugrul Tanyol, Metin Cengiz, Hüseyin Ferhad, Enver Ercan, Yavuz Özdem, Mustafa Köz, Küçük Iskender …

J’ai vu la mer

anthologie de la poésie turque contemporaine (éd. Bleu autour, 2010)

Une anthologie illustrée de près de cinquante dessins de Abidin Dino (1913-1993), plus connu en France sous le nom d’Abidine, ami de nombreux poètes dont Nazim Hikmet et Orhan Veli. L’édition de cette anthologie a été soutenue par le Centre National du Livre dans le cadre de la Saison de la Turquie en France.

 

NÂZIM HIKMET (1901-1963)

Dans le domaine de la poésie Nâzim Hikmet s’éloigne de la tradition des vers classiques.  Premier à renouveler la poésie turque, il va devenir le représentant d’un courant dit de « poésie libre » Considéré comme le plus grand poète turc du XXe siècle Nâzim Hikmet, également dramaturge et romancier, a utilisé de nombreux pseudonymes. Né en 1901à Salonique, fils et petit-fils de fonctionnaires ottomans, il est initié à la poésie orientale classique par son grand-père et par sa mère, passionnée de poésie et de peinture française. Mais plusieurs événements – l’occupation en 1919 d’Istanbul par des puissances étrangères, le soulèvement des paysans turcs pour l’indépendance (1919-1923) – vont le décider à devenir un militant actif, un poète engagé. Nâzim Hikmet disait vouloir : « Vivre comme un arbre, seul et libre, vivre en frère comme l’arbre d’une forêt » Ses prises de positions idéologiques et ses écrits dénonçant les injustices sociales en font un opposant au régime et l’un des témoins majeurs des tourments, des tragédies et des luttes de son temps. Lors de son séjour à Moscou en 1921, il rencontre Maïakovski et les futuristes russes qui exerceront sur lui une influence durable. Arrêté et emprisonnée de 1938 à 1950, c’est durant cette longue période carcérale qu’il écrit l’essentiel de son œuvre. A l’étranger, et particulièrement en France, les intellectuels, dont Aragon, Tzara, Dobzynski, se mobilisent et mènent une campagne efficace pour sa libération. Enfin libre à 49 ans, on le convoque peu après pour le service militaire, pour y échapper il reprend le chemin de l’exil et ne reverra plus la Turquie. Déchue de sa nationalité, l’exil est pour lui une nouvelle « prison à ciel ouvert ». Il voyage beaucoup, Paris, Prague, Varsovie, Vienne, Cuba, la Chine, l’Afrique…Il rencontre Pablo Neruda en 1951 à Berlin-Est. Le « géant aux yeux bleus », comme on avait coutume de l’appeler, meurt à Moscou à l’âge de 61 ans, l’année suivante ses poèmes sont publiés en Turquie, après 28 ans d’interdiction. Mais il faudra attendre jusqu’en 2009 pour que la nationalité turque lui soit enfin rendue et que le gouvernement turc accepte que sa dépouille soit rapatriée de Moscou.

Ceci est un rêve, Ferhat et Sirin, Ivan Ivanovitch a-t-il existé ?

éd. L’Espace d’un instant, 2005

Ces trois pièces révèlent la diversité d’écriture du poète. Dans Ceci est un rêve, l’auteur imagine sous forme d’opérette une sorte de Vaudeville oriental avec humour, intrigues amoureuses et situations burlesques. Ferhat et Sirin, une histoire écrite en prison, lui a été inspiré d’une légende populaire. Ferhat doit relever un défi titanesque pour retrouver Sirin, sa bien-aimée et l’épouser : Il doit percer une montagne qui permettra d’amener l’eau jusqu’à un village où les habitants meurent de soif. Ivan Ivanovitch a-t-il existé ? seule œuvre théâtrale du poète à avoir été publiée en français, est une pièce à caractère social et politique.

La Joconde et Si-Ya-Ou

Trad. Abidin Dino (éd. Parangon, 2004)

Ce long poème (674 vers libres), d’une construction particulièrement originale et d’une grande liberté d’écriture, a été écrit à la prison de Hopa en Anatolie (1928-1929). De sa geôle, le poète s’évade et s’envole vers Paris dont il rêve. Si-Ya-Ou, un jeune étudiant chinois visite le Louvre à l’occasion d’un séjour à Paris. Devant le célèbre tableau de la Joconde il tombe follement amoureux de Mona Lisa et de son sourire. Troublée qu’on la regarde ainsi, la belle florentine succombe au charme du jeune homme. Mais celui-ci doit repartir dans son pays. Le narrateur entre en scène, atterrit en monoplan sur le toit du Louvre, les cloches de Notre-Dame sonnent minuit. Il déroule une corde de 50 toises jusqu’à la fenêtre où se situe la Joconde. Il siffle et la Joconde interpellée ouvre la fenêtre, sort de son cadre doré, grimpe à la corde et arrive sur le toit en tenue de Vierge Marie. Décidée à aller rejoindre son amoureux reparti en Chine, la Joconde quitte Paris en avion piloté par le narrateur. Mais quand elle arrive, après maintes péripéties en Chine, il est trop tard : son bien-aimé est exécuté sous ses yeux par les troupes de Tchang Kaï-Chek. Alors la Joconde se lance avec ardeur dans une lutte révolutionnaire et arpente toute la Chine pour combattre l’impérialisme. Mais sa quête est vaine, elle est arrêtée, condamnée et brûlée à la flamme d’un briquet. Mais morte Mona Lisa a retrouvé son sourire ! Dans ce récit le poète mêle habilement et poétiquement le fantastique à la réalité politique et sociale.

C’est un dur métier que l’exil

éd. Le temps des Cerises, 2009

Nâzim Hikmet, qui a passé une grande partie de sa vie en prison ou en exil, est l’une des très grandes voix de la poésie turque et de la poésie universelle.
La première anthologie de ses poèmes avait été publiée en France, en 1951, alors qu’il venait juste d’être libéré de prison et qu’il s’apprêtait à fuir la Turquie (pour échapper à de nouvelles persécutions qui auraient certainement entraîné sa mort). Les poèmes étaient traduits en français par Hasan Gureh.
L’anthologie que présente le Temps des Cerises a été composée et traduite en français par le poète Charles Dobzynski, qui a travaillé sur ces adaptations avec Nazim Hikmet lui-même, lors des rencontres qu’ils eurent dans les années cinquante et soixante à Paris et Varsovie.

Vivre comme un arbre, seul et libre, vivre en frères comme les arbres d’une forêt

éd. Turquoise, 2002

Après 14 ans de prison, le poète s’exile en Russie. Sa poésie témoigne de sa souffrance, de ses joies et de ses espoirs. Biographie, textes d’écrivains de tous horizons : Aragon, Asturias, Sartre, Tzara… et choix de poèmes.

Anthologie poétique

Editeurs Français réunis, 1964

Ce choix, ample et représentatif, donne à entendre la voix profondément humaine du poète, amoureux de la vie et de la justice. D’Hikmet, Philippe Soupault disait qu’on ne pouvait pas le lire sans en être changé. Profondément attaché à son pays, on ressent à travers sa poésie la nostalgie, son drame personnel (éloignement de l’être aimé, de son fils, de sa terre natale, des souffrances de son peuple), son espoir de construire un monde nouveau.

 

Il neige dans la nuit et autres poèmes

éd. Gallimard, 2000

Cette anthologie propose un parcours d’ensemble dans une œuvre multiforme qui conjugue pièces lyriques, notations véhémentes, instants saisis au vol, élégies et vastes fresques épiques. La poésie de Nâzim Hikmet, sans jamais céder à la grandiloquence, participe d’une ambition immense : changer l’ordre des choses en changeant l’image qu’on en donne (4ème de couverture)

s