Le français est une langue indo-européenne de la famille des langues romanes.
Sa grammaire et la plus grande partie de son vocabulaire sont issues des formes orales et populaires du latin, telles que l’usage les a transformées depuis l’époque de la Gaule romaine.
Les Serments de Strasbourg, qui scellent en 842 l’alliance entre Charles le Chauve et Louis le Germanique, rédigés en langue romane et en langue germanique, sont considérés comme le plus ancien document écrit en français.
Au Moyen Âge, la langue française est faite d’une multitude de dialectes qui varient considérablement d’une région à une autre. On distingue principalement les parlers d’oïl (au Nord) et les parlers d’oc (au Sud).
Avec l’établissement et l’affermissement de la monarchie capétienne, c’est la langue d’oïl qui s’impose progressivement. Elle est aujourd’hui parlée sur tous les continents par environ 274 millions de personnes, dont 212 millions l’utilisant quotidiennement, avec 76 millions à 77 millions de locuteurs natifs. En 2014, 77 millions d’élèves et étudiants s’instruisent en français dans le monde. Elle est une des six langues officielles et une des deux langues de travail (avec l’anglais) de l’Organisation des Nations unies, et langue officielle ou de travail de plusieurs organisations internationales ou régionales, dont l’Union européenne.
Après avoir été à l’époque de l’Ancien Régime français la langue des cours royales et princières, des tsars de Russie aux rois d’Espagne et d’Angleterre en passant par les princes de l’Allemagne, elle demeure une langue importante de la diplomatie internationale aux côtés de l’anglais, de l’allemand et de l’espagnol.
La langue française est un attribut de souveraineté en France, depuis 1992 « la langue de la République est le français » (article 2 de la Constitution de la Cinquième République française). Elle est également le principal véhicule de la pensée et de la culture française dans le monde.
La langue française fait l’objet d’un dispositif public d’enrichissement de la langue, avec le décret du 3 juillet 1996 relatif à l’enrichissement de la langue française.
Particularité de la langue française, son développement et sa codification ont été en partie l’œuvre de groupes intellectuels, comme la Pléiade, ou d’institutions, comme l’Académie française. C’est une langue dite « académique ». Toutefois, l’usage garde ses droits et nombreux sont ceux qui popularisèrent cette langue vivante, au premier rang desquels Rabelais et Molière : il est d’ailleurs question de la « langue de Molière ».
AFRIQUE DE L’OUEST
LITTÉRATURE
CONTES
Dans toute l’Afrique de l’ouest on connait ce conte célèbre.
Sira le sorcier
Sira est belle comme l’aurore, son sourire laisse apparaître des dents blanches comme du coton au soleil. Bani et Sira ont grandi ensemble, ils s’aiment et vont se marier. Tura le sorcier, jaloux de leur union, est toujours accompagné d’un vautour à couronne blanche qui symbolise son pouvoir maléfique. Dés la première nuit de noces il se décide à entrer en action pour empêcher tout rapport amoureux entre les jeunes mariés. La première nuit, puis la seconde nuit et toutes les nuits suivantes, Sira ressent de terribles maux de tête, auxquels s’ajoutent bientôt d’autres maux, de ventre, de dos, de hanches etc. Elle transpire, souffre, crie, pleure…Sira demande à sa mère de l’aider à sauver son mariage. Elle convoque tous les marabouts et sorciers, sacrifie presque la totalité des ses troupeaux de bovins et elle implore leur aide. Mais rien ne change. Une semaine plus tard la belle famille vient demander l’annulation du mariage, celui-ci n’étant pas consommé, et elle réclame le remboursement des frais.
Sira quitte son mari et revient chez sa mère. Désespérée, elle lui dit qu’elle épousera celui qui réussira à la guérir. La nouvelle se répand dans le village et le sorcier se présente annonçant qu’en trois jours il pense pouvoir la délivrer de son mal. La mère ne voit pas l’intrusion de cet homme comme un bon présage. De plus, ce sorcier et ses vautours représentent pour elle une malédiction. Mais elle s’incline devant sa fille qui met tout son espoir dans cet homme. Le sorcier commençe son traitement et bien sûr il réussit à guérir Sira. Sa mère est affolée à l’idée de l’union de sa fille bien-aimée avec le sorcier. Déjà il fanfaronne et annonçe à grand bruit son mariage qu’il veut célébrer dans les plus brefs délais. La nuit de noces, sans être capable d’offrir les plus délicates prémices à sa femme, il veut faire l’amour tout de suite. Mais au moment de passer à l’acte il constate qu’il n’a plus rien entre les jambes. Elle essaye de le rassurer, mais il la juge responsable, la traite de sorcière, la répudie sur le champ et quitte le village dans la nuit. Guérie Sira, belle comme l’aurore, épouse Bani et de nombreux enfants naissent de leur amour.
BÉNIN
LITTÉRATURE
Doguicimi
PAUL HAZOUMÉ (1935, réédité en 1987 par l’Harmattan)
Ce roman de Paul Hazoumé (1890-1980) a été un succès dès sa publication en 1935. C’est un étudiant africain à Jussieu qui m’en a parlé en me disant avec fierté : « ce roman est tellement stylé » que l’Académie française lui a décerné le « Prix de la langue française » en 1939. Ce livre est à la fois une grande fresque historique, un document ethnologique sur l’ancien royaume du Dahomey avec de multiples intrigues de palais et une histoire d’amour. Doguicimi et Toffa s’aiment mais la belle Doguicimi, bien qu’elle soit une jeune femme du peuple, est aimée par le prince Vidaho qui aimerait l’épouser. Quand Toffa meurt, Doguicimi veut être enterrée vivante et accompagner son mari dans son ultime voyage vers l’au-delà. Le prince tente de la dissuader de vouloir mourir par fidélité à son mari. Bien qu’il soit amoureux le prince abandonne son dessein, probablement parce qu’il craint d’offenser les morts, Toffa bien sûr mais aussi ses prestigieux ancêtres.
BURKINA FASO
CINÉMA
SIDA YA SIDA
CHRISTIAN BOGLO (CM, 1993)
Une bande de jeunes, sceptiques quant à l’existence du sida, minimisent l’importance de cette maladie et décident de ne pas changer leurs habitudes, car l’amour naturel c’est tellement mieux. Un jour ils se trouvent confrontés à la dure réalité de cette maladie, mais il est trop tard et rien ne peut les sauver.
KINI et ADAMS
IDRISSA OUEDRAOGO (Sélection officielle longs métrages Festival de Cannes 1997)
Netsayi Chigwendere (Binja), John Kani (Ben), Vusi Kunene (Kini).
Ce film nous déroule une belle histoire d’amitié entre deux copains paysans Kini, marié, Adams, célibataire, qui poursuivent un rêve : partir et aller réussir en ville. Sans moyens, ils retapent une vieille bagnole, font des petits boulots, sont embauchés à la carrière voisine. Kini sauve Ben d’un tir de mine, ce qui lui vaut une promotion. Il commence à jouer le petit chef. Adams s’amourache de Binja, une prostituée, Kini le met en garde et tente de le convaincre que celle-ci n’est intéressée que par son portefeuille. Adams, rongé par la jalousie, fait croire à son ami que Ben a séduit sa femme. Furieux il agresse Ben et est aussitôt exclu du chantier. La belle amitié se lézarde, alors qu’avec du boulot leur rêve pouvait se réaliser. Kini et Adams vont finalement devenir des ennemis mortels.
SAFI, LA PETITE MÈRE
RASÒ GAMENTORÉ (2004, CM)
Madina Diane Ouédraogo (Safi), Alimata Salouka (Binta), Aminata Dao (Settu), Antoine Yougbaré, Halidou Sawadago (le mari).
Inspirée de faits réels se rattachant à l’ethnie Samou, c’est une histoire d’amour très touchante. Safi, une petite fille de huit ans, assiste à l’accouchement de sa mère qui meurt en mettant au monde un petit garçon. Selon la tradition, le nouveau-né doit être sacrifié et enterré avec sa mère afin de conjurer le mauvais sort. Safi s’enfuit avec le bébé et part pour la ville. En chemin elle rencontre une mère de huit enfants puis découvre les peurs et les illusions de la ville. Kidnappée par un trafiquant d’enfants, elle réussit à s’échapper et à trouver un lieu pour vivre avec son petit frère.
DANSE SACRÉE À YAKA
GUY-DÉSIRÉ YAMEOGO (2008)
Sita Ouédraogo (Binéta), Blandine Yameogo (la voyante), Rasmané Ouedraogo (Rasò).
Binéta vit dans le petit village de Yaka. Un soir sur le chemin de retour de l’école, on lui dit qu’elle va être mariée à Baldé, un vieux notable. Elle ne peut accepter cette union et ne trouve qu’une solution, prendre la fuite. Le mariage est célébré sans elle et Baldé meure peu de temps après. Selon la tradition, la jeune veuve est convoquée et doit danser au cours d’un rituel pour que l’âme de son mari repose en paix. Benita refuse de rentrer dans son village considérant que le mariage n’a pas eu lieu. Commence alors pour elle une vie qui se déroule comme une série noire qui la jette dans la tourmente.
BURUNDI
CINÉMA
A QUI LA FAUTE ?
BERNARD MENYO (1984)
En désaccord avec son père qui veut lui imposer un mari, Juliette choisit d’épouser celui qu’elle aime. Mais le prétendant désigné par son père, éconduit par Juliette, va décider de la tuer le jour des ses noces.
GITO L’INGRAT
LÉONCE NGABO (1992)
2ème prix section Jeunes Festival de Cannes 1993 – Joseph Kumbela (Gito), Marie Bunel (Christine), Aoua Sangare (Flora).
Gito, étudiant Burundais, mais aussi couturier talentueux vit à Paris avec Christine sa compagne. Il décide de rentrer au pays avec ses diplômes sous le bras, rempli d’illusions sur l’emploi qu’il pourra trouver à Bujumbura, la capitale. Il va jusqu’à imaginer qu’il pourrait occuper la fonction de ministre. Il promet à Christine de la faire venir dès qu’il aura trouvé un emploi. Mais il se retrouve sans boulot, la fonction publique est saturée. Entre-temps il a retrouvé Flora, un amour d’enfance. Son cœur balance entre l’africaine et la française. Christine sans nouvelle, décide de le rejoindre sans le prévenir. Les deux femmes se rencontrent et vont se lier pour lui donner une leçon. Gito en Kirundi, langue nationale du Burundi, signifie l’ingrat.
CAMEROUN
MUNA MOTO (L’ENFANT DE L’AUTRE)
JEAN-PIERRE DIKONGUÉ PIPA (1975, noir et blanc)
Grand prix du festival international du film francophone de Genève en 1975 – Gisèle Dikongue-Pipa, Arlette Din Bell (Ndome), Philippe Abia (Mbongo), David Endene (Ngando), Giselle Pipa Dikonge (l’enfant).
Deux jeunes gens Ndongo et Ndomé sont amoureux et désirent se marier. Selon la tradition le prétendant doit apporter une dot mais, orphelin, il ne peut l’acquitter alors il travaille dur comme bûcheron, artisan et pêcheur, pour relever ce défi. L’oncle de Ndongo, qui a déjà trois femmes stériles et pas d’enfant, convoite Ndomé. Elle tombe enceinte d’Ndongo, et met au monde une petite fille mais rien n’y fait. L’oncle qui veut un enfant, propose d’épouser la jeune fille. Aux yeux de tous l’argent vaut plus que les sentiments sincères de son bien-aimé, l’oncle reçoit l’approbation de la famille d’Ndomé et du village. Désespéré Ndongo, le jour de la fête traditionnelle du village, enlève son enfant.
POUSSE-POUSSE
DANIEL KAMWA (1975)
Bibi Kouo, Marthe Ndone Awane (Rose), Daniel Kamwa (Pousse-Pousse), Marcel Mvondo (le beau père).
Une comédie-ballet très connue en Afrique. Un jeune conducteur de triporteur surnommé Pousse-Pousse, aime Rose et désire l‘épouser. Mais il doit payer la dot et papa Bisséké, le père, n’est pas près de céder à cette coutume qui, il l’espère, va lui rapporter gros. Pousse-Pousse se démène pour faire des économies et donne une belle somme à son futur beau-père, mais celui-ci veut plus encore. Le mariage va-t-il avoir lieu quand même ? Une comédie enlevée qui illustre l’émancipation de la femme.
RIBO OU LE SOLEIL SAUVAGE
JOSEPH HENRI NAMA et ROGER RACINE (1978)
Suzanne Bandolo (Ribo), Daniel Ndo (Teteir), Dieudonné Ond Ond (Dikagan), Valentin Elandi (Zok).
Un film inspiré d’un conte camerounais fort ancien, basé sur trois légendes remontant à l’époque où l’harmonie régnait dans trois villages. Ribo « l’Antilope de la savane », vivait dans le village des cultivateurs, Dikagan, son fiancé dit « Oeuf de caïman », habitait dans celui des danseurs, et Teteir, un tyran polygame, vivait dans le village des guerriers. Ribo, qui depuis sa naissance était promise à Dikagan, est kidnappée par les gardes de Teteir. Ce dernier, qui a déjà quatre femmes mais pas d’enfant, décide qu’une cinquième femme pourrait enfin lui donner un premier enfant. Les villages de Ribo et de Dikagan vont mener une lutte acharnée contre le village guerrier pour libérer la prisonnière. Enfin libres Ribo et Dikagan vont pouvoir convoler et une grande fête traditionnelle est célébrée par les villages victorieux.
LE MARIAGE D’ALEX
JEAN-MARIE TENO (2002)
Un mariage est toujours un événement heureux. Mais dans ce film cette journée revêt une atmosphère particulière, lourde et intimiste, due à la tradition de la polygamie en Afrique. La première épouse ne sera plus la seule élue dans le coeur de son mari, la célébration du mariage avec la seconde épouse va changer la vie conjugale du couple. Pour le mari, c’est un jour de fête, une nouvelle nuit de noces, une nouvelle femme qui va partager sa vie et lui donner du plaisir ; pour la première épouse, qui se plie à la tradition, ce n’est pas un jour heureux.
UN AMOUR PENDANT LA GUERRE
OSVALDE LEWAT-HALLADE (2005)
Aziza a perdu tout contact avec Didier, son mari, pendant six ans. Parti à l’issue du déclenchement de la guerre ethnique au Congo-Kinshasa, elle est restée seule avec leurs quatre enfants. A son retour ils essayent de se retrouver. Mais Aziza dit à Didier : « Tu as changé. Tu t’énerves pour des riens contre les enfants ». Son mari, après six ans d’absence, a du mal à reprendre sa place. Comment reconstruire une vie de couple et de surcroit une vie de famille, après une telle distance ? La guerre laisse des traces, des blessures. Aziza, journaliste hantée par les images de la guerre, décide de partir pour enquêter sur le sort réservé aux femmes et de retourner dans le Sud-Kivu. Durant ce conflit interminable elles ont subi (viols, humiliations, mutilations…), des faits trop souvent occultés. Elle dénonce le manque de conscience de l’Etat envers ces victimes. Le film s’appuie sur la complexe histoire d’amour d’un couple heureux avant la guerre, désorienté pendant et après le conflit et qui, malgré le désir de se retrouver vont, déchirés par trop de souvenirs douloureux, s’éloigner l’un de l’autre.
MÂH-SAAH-SAH
DANIEL KAMWA (2008)
Abdel Aziz Nchankou (Ncharé), Béa Flore Mfouemoun (Mapon), Samuel Poyouoko (Achirou), Ibrahim Njankouo (Moluh)
C’est l’histoire d’un bel amour contrarié et bafoué par le pouvoir de l’argent. Nous sommes au Cameroun en pays Bamoun où vit Ncharé, un orphelin de 16 ans, recueilli par son oncle Achirou. À peine arrivée dans ce nouveau logis il a un coup de foudre partagé avec Mapon, âgée de 14 ans. Adulte Ncharé est devenu sculpteur de bronze et espére épouser Mapon, mais il doit travailler dur pour la dot. Au cours d’une danse de séduction il a pour rival d’autres prétendants, mais il l’emporte et leurs fiançailles sont célébrées. Peu de temps après la mère de Mapon accouche de son 4ème enfant, mais rapidement il présente les signes d’une maladie qui nécessite des soins. Son mari accepte l’aide de Moluh, un homme d’affaires et député, qui ne tarde pas à jeter son dévolu sur la jeune fiancée. Le père de Mapon, bien qu’elle soit promise à Ncharé, tente de la pousser dans les bras de Moluh. Ce dernier, pour obtenir cette épouse, laisse courir une rumeur, Ncharé aurait commis un vol. Déchirés par cet acharnement à vouloir les séparer, vont-ils réussir à vivre leur amour ?
LITTÉRATURE
Perpétue ou l’habitude du malheur
MONGO BÉTI
(1974, éd. Buchet-Chastel 2003)
Mongo Béti (1932-2001), dit Ezaboto, auteur de plusieurs romans célèbres dans la littérature africaine francophone, a la plume rebelle, un style alerte et percutant. Je n’évoquerai que ce roman où l’on découvre l’attachement profond d’un frère envers sa sœur Perpétue et qui veut comprendre pourquoi elle est passée comme une météore sur cette terre. Lors de son retour dans son village, après avoir passé six ans dans un camp de concentration pour avoir affiché son opposition au régime de Baba Toura, Essola apprend avec stupeur que sa sœur est décédée. Il enquête sur sa mort et recueille des témoignages qui vont peu à peu lui révéler son martyre. Contrainte d’abandonner ses études, elle a été mariée sans son consentement à un homme, tyrannique, brutal et asservissant. Un mariage dont elle a subi les pires outrages, en femme apeurée et résignée, jusqu’à mourir en couches à l’âge de vingt ans. Mongo Béti, à travers la vie tragique de Perpétue, dénonce le cas de la femme africaine qui n’est pas libre de disposer de son destin. Cet ouvrage est considéré par plusieurs critiques littéraires comme le premier livre « féministe » de la littérature africaine francophone.
L’Homme qui m’offrait le ciel
CALIXTHE BEYALA
(2007, éd. Albin Michel)
Cette jeune romancière française d’origine camerounaise, à la plume rebelle est l’auteur de nombreux romans – Les honneurs perdus (1996, grand prix du roman de l’Académie française), Maman a un amant (1993, grand prix littéraire d’Afrique noire) – le plus souvent consacrés à défendre la place et la dignité de la femme africaine dans la société, en Afrique comme en Europe. Dans L’Homme qui m’offrait le ciel elle évoque un amour passion qui va au fil des jours évoluer inexorablement vers une rupture. Elle est africaine et écrivain, lui animateur vedette de la télévision. Trop de différences, de préjugés, de pressions sociales,… Mais aussi de peur du changement, de l’inconnu, de blesser l’entourage, de franchir le pas…
CÔTE D’IVOIRE
CINÉMA
LA FEMME AU COUTEAU
TIMITÉ BASSORI (1968, noir et blanc)
Mary Vieyra, Emmanuel Diaman, Bertin Kouakou, Danielle Alloh.
Ce film de Timité Bassori, considéré comme l’un des pionniers du cinéma ivoirien, évoque la difficulté des Africains à faire un choix entre une émancipation à l’européenne ou rester prisonnier de certaines traditions qui sont parfois un vrai frein pour construire leur vie d’adulte. C’est l’histoire d’un jeune ivoirien revenu d’Europe en Afrique. Il se trouve soudain confronté entre la modernité qu’il a vécue et appréciée en Europe et la tradition que lui impose la vie dans son pays natal. Il subit un stress psychologique, il est hanté par l’image d’une femme brandissant un couteau et de ce fait atteint d’une inhibition sexuelle. Il tente en vain de trouver un remède auprès de guérisseurs ou de médecins jusqu’au jour ou une amie lui révèle l’origine de ce traumatisme qui s’est introduit dans les méandres de son inconscient. Il est resté traumatisé, à son insu, par l’image d’une mère répressive qui remonte à son enfance.
MOUNA OU LE RÊVE D’UN ARTISTE
HENRI DUPARC (1969, noir et blanc)
Un sculpteur idéaliste est amoureux de Mouna. Ses œuvres sont revendues à Abidjean-Plateau à des touristes naïfs par un marchand retors qui les présente comme des antiquités. Opportuniste Mouna va quitter l’artiste pour le marchand nanti. Incompris et bafouée l’artiste sombre dans la folie.
A NOUS DEUX FRANCE ! FEMME NUE, FEMME NOIRE
DÉSIRÉ ÉCARÉ (1969, noir et blanc)
Frédérique Andrew, Guy Davout, Fabienne Fabre, Pierre Garnier, Marie-Gabrielle N’Guyepe, Frédérica Layne.
Une comédie satirique empreinte de légèreté et d’humour évoquant la difficulté des mariages mixtes, notamment d’un point de vue de la communauté noire. Portrait d’un jeune dandy noir venu d’Afrique à Paris, pour retrouver sa femme, blanche, et leur petite fille. Le cinéaste aborde aussi la frustration ressentie par les femmes africaines délaissées par les Africains pour aller épouser des françaises.
L’HERBE SAUVAGE
HENRI DUPARC (1977)
Viviane Touré (prix d’interprétation féminine au festival de Carthage en 1978), Clémentine Tikida, Fofana.
Difficile de concilier une vie professionnelle bien remplie, elle est médecin et lui chef d’entreprise, avec les contraintes d’une vie conjugale. L’harmonie de cette famille de la bourgeoisie d’Abidjan vole en éclat quand le mari trouve refuge dans les bras d’une autre femme son « deuxième bureau », selon l’expression africaine. La jalousie et l’adultère incitent la femme légitime à se séparer de son mari pour vivre une vie indépendante.
DJELI, CONTE D’AUJOURD’HUI
FADIGA KRAMO-LANCINÉ (1981)
Fatou Ouattara, Joachim Ouattara, Yao et les habitants du village de Kouto.
Fanta et Karamoko s’aiment depuis leur plus tendre enfance et leurs familles se connaissent bien. Ils sont étudiants et désirent se marier, quoi de plus naturel. Mais ils ignorent que leur mariage va se révéler impossible pour leurs familles. Karamoko est le fils d’un griot et Fanta la fille d’un descendant direct des familles illustres du Mandingue. Même si l’Afrique est en marche vers la modernité, les mentalités et les traditions des familles restent encore bien vivantes.
BAL POUSSIÈRE
HENRI DUPARC (1988)
Nombreuses récompenses dont le Grand prix du festival d’humour de Chamrousse en 1989 – Hanny Tcheley (Binta), Bakary Bamba (Demi Dieu), Naky Sy Savane (Nya), Thérèse Taba (Fanta).
Sous forme de comédie « à l’africaine » Henri Duparc traite de sujets graves et délicats, entre autres de la polygamie. A travers des situations à rebondissements, on suit l’histoire d’un couple monogame et polygame, le choix complexe entre tradition et modernité, vie rurale et vie urbaine. Alcaly, considéré comme Demi-Dieu dans son village, mène une vie tranquille avec ses cinq épouses. Quand un jour revient au village la jeune et belle Binta, il se dit qu’une sixième épouse lui conviendrait bien. Ainsi, il en aurait une pour chaque jour de la semaine et le dimanche il se reposerait et récompenserait celle qui l’aurait le plus comblé dans la semaine. Pour s’attirer les faveurs de la famille de Binta, Alcaly la couvre de cadeaux. Mais Binta, la rebelle, refuse cette union. Quand finalement elle accepte, elle agira comme une épouse moderne et les conflits ne vont pas tarder à éclater, mais elle va néanmoins faire avancer les mentalités. Elle lance l’idée de répartir en deux clans les hommes et les femmes : les « pagneuses », les femmes plus âgées et les « robeuses » les femmes plus évoluées. Tout le village adhère…Et côté hommes on trouve les « pagneurs », conservateurs et les « robeurs, » évolués. Cette répartition met tout le monde à égalité !
RUE PRINCESSE
HENRI DUPARC (1993)
Félicité Wouassi (Josie), Alexis Bouazo (Jean), Gérard Assomba, Georgette Pare.
Jean, fils d’une famille bourgeoise d’Abidjan délaisse peu à peu son travail à la scierie familiale. Il veut être musicien et entre comme joueur de kora dans une troupe locale. Cette initiative l’éloigne définitivement de son père. Rue Princesse, quartier chaud et haut lieu de la prostitution, il rencontre Josie, une prostituée dont il tombe amoureux. Il tente de lui faire comprendre qu’elle peut vivre d’autre chose que du commerce de son corps. Bien qu’elle ait parmi ses clients des notables d’Abidjan, elle est séduite par Jean qui la persuade qu’elle a d’autres talents, celui de chanter par exemple. Elle intègre le groupe de musiciens et leur couple surprend tout leur entourage.
UNE COULEUR CAFÉ
HENRI DUPARC (1997)
Prix du public Los Angeles 1998 – Jean-Marie Adiaffi, Rachida Brakni, Malcom Conrath, Akissi Delta, Abdoulaye Komdouri.
On l’appelle « Docteur » à Montreuil-sous-Bois dit aussi Montreuil-sous-Bamako. Il est garçon de salle dans un hôpital parisien, marié et sans enfant. Pour ses vacances il part en Afrique où il décide de prendre une deuxième épouse, la belle Kada. Pour rentrer France, il demande un visa pour l’heureuse élue mais l’ambassade lui refuse, la polygamie étant interdite en France. Cela ne déboute guère notre jeune marié qui va, avec l’aide d’amis complaisants, faire établir de faux papiers où Kada figure comme étant sa fille. De retour à Montreuil, Kada se retrouve enceinte de son « père » ou de son mari ? Quand la justice française va s’en mêler, comment Docteur va-t-il se sortir de cet imbroglio ?
LITTÉRATURE
ROMAN
Le fils de-la-femme-mâle
MAURICE BANDAMAN
(1993, éd. L’Harmattan, Grand prix littéraire d’Afrique noire)
J’aime le choix de l’auteur de commencer son récit en s’adressant au public (ses lecteurs) comme le fait un conteur ou un griot dans un village pour obtenir le silence. Ainsi débute ce conte romanesque où le narrateur (le conteur) invite le lecteur (l’assistance lors d’une veillée) à écouter une histoire et, comme dans tous contes traditionnels, il n’oublie pas de dire la formule stéréotypée, universelle : « il était une fois… ».
N’hésitez pas à lire ce livre pour découvrir la mystérieuse et surprenante histoire de Tankan 1 (qui reçoit en cadeau un nouveau-né à l’aspect terrifiant, il a deux sexes ! Une incroyable et énigmatique créature qui, à la fois femme et homme, aura pour mission sur la terre de changer le monde), de Tankan 2 et de Tankan 3…
Champs de batailles et d’amour
VERONIQUE TADJO
(1999, éd. Présence Africaine)
Le titre de ce beau livre fait référence à un champ de bataille, non pas en temps guerre, mais à travers l’histoire d’un couple. Au commencement il y a l’amour, un coup de foudre entre Aimée et Eloka. Elle est blanche et a grandi en Europe, lui est noir et a grandi en Afrique. Quand Eloka décide de rentrer dans son pays natal, Aimée n’hésite pas à le suivre. Ils s’installent à Abidjan où ils espèrent faire évoluer la société et pouvoir construire une vie meilleure. Mais au fil du temps la ville, le pays, l’Afrique et les sentiments sont autant de champs de bataille et d’amour qui se dessinent. Le couple va vivre l’un à côté de l’autre certes, mais retranché dans ses questionnements et une profonde solitude s’installe entre eux. L’originalité du roman est de l’avoir imaginé comme une succession de tableaux ou de monologues intérieurs où chacun tente d’expliquer ce qu’il ressent sans jamais réussir à engager un dialogue avec l’autre.
POÉSIE
Bernard B. Dadié
Il a fêté ses 100 ans en 2016, a reçu le prix Thomas Dadet, décerné par l’Unesco en hommage à sa longue carrière d’écrivain. Il a aussi été un homme politique, un dramaturge et un poète. À travers son long parcours il a lutté pour l’indépendance, fait du journalisme militant, été prisonnier politique (1949-1950), et ministre de la culture (1977-1986). Son œuvre est riche et diversifiée et beaucoup le considère comme le père de la littérature ivoirienne. Bernard Dadié confie : « « Ecrire est, pour moi, un désir d’écarter les ténèbres, un désir d’ouvrir à chacun des fenêtres sur le monde ». Parmi ses œuvres les plus connues citons Climbié (1982), considéré comme le premier ouvrage de fiction ivoirien ; Les villes (1933), la première pièce de théâtre de l’Afrique francophone ; Patron de New York (1965) et La ville où nul ne meurt (1969), tous deux récompensés du Grand prix littéraire d’Afrique noire ;
C’est chez Pierre Seghers qu’il publie Afrique debout (1950), un recueil de poèmes, Légendes africaines, un de ses premiers livres de contes (1954). Hommes de tous les continents (éd. Présence Africaine), un recueil de poésie ; Légendes et poèmes (Nouvelles éditions ivoiriennes)
Choix de poème :
Tu dors (Anthologie Six poètes d’Afrique francophone (éd. Points 2O10)
Tanella Boni
Née à Abidjan en 1954, a fait ses études à la Sorbonne d’où elle est sortie Docteur ès Lettres. Romancière, essayiste, nouvelliste, professeur de philosophie et poète, elle est l’auteur de nombreux romans et essais. Parmi ses recueils de poésie, vous pouvez lire :
Labyrinthe, (éd. Akpagnon, 1984)
Grains de sable (éd. Le bruit des autres, 1993)
Il n’y a pas de parole heureuse (éd. Le bruit des autres, 1997)
Chaque jour l’espérance (éd. l’Harmattan, 2002)
Ma peau est fenêtre d’avenir (éd. Larochellivre-Rumeur des âges, 2004)
Gorée île baobab, (éd. Le bruit des autres-Ecrits des Forges, 2004)
Jusqu’au souvenir de ton visage (éd. Alfabarre, 2010)
L’avenir a rendez-vous avec l’aube (éd. Vents d’ailleurs, 2011)
Choix de poèmes :
Écrire le cri
Cette parole dite
MYTHES ET LÉGENDES
Comme dans toutes légendes ou mythes il existe plusieurs versions, mais celles-ci sont les plus communément relatées.
La reine Abla Pokou
Je me souviens d’une journée où le soleil commençait à s’annoncer couchant avec une lumière poudrée d’or. Je me trouvais en Côte d’Ivoire avec ma sœur Florence et mon cousin Stéphane, nous étions dans un petit village où des enfants étaient assemblées autour d’un griot. L’un d’eux est venu vers moi pour me demander si j’avais des bonbons et si je voulais venir avec mes amis écouter l’histoire de la reine Pokou. Intrigués, et ne voulant pas refuser une si aimable invitation, nous avons suivi le petit groupe et son griot, un peu à l’écart du village jusqu’à un magnifique Boabab. Devant la majesté de cet arbre à la silhouette extraordinairement tourmentée et dont les fruits se nomment pain de singe, ma première pensée a été pour le Petit Prince qui pose toujours des questions : « les baobas, avant de grandir, ça commence par être petit ? » (Antoine de Saint-Exupéry).
Assis autour du baobab le griot commença à raconter et à chanter l’étonnante et mystérieuse légende de la reine Pokou. Obligée de fuir le Ghana avec son peuple la reine se dirigeait vers la Côte d’Ivoire. Après une longue marche ils atteignirent les rives d’un fleuve, qui formait une frontière naturelle entre le Ghana et la Côte d’Ivoire. Les pluies avaient gonflées les eaux de la rivière, impossible de la franchir. La reine interrogea le devin qui l’accompagnait. Celui-ci répondit et conseilla de tenter de calmer la furie du génie des eaux par un sacrifice de la reine. Elle devait offrir ce qu’elle avait de plus cher. Elle commença à offrir tous ses bijoux, ses perles d’or et d’argent. Mais les eaux ne cessaient d’être tourmentées. Désespérée, le devin lui rappela qu’elle devait offrir ce qu’elle avait de plus cher. N’était-ce pas l’enfant qu’elle portait sur son dos ? La reine terrifiée accomplit le sacrifice pour sauver son peuple et déposa son petit être dans l’eau. Les eaux se turent et s’assagirent, la reine et son peuple traversèrent le fleuve. Pokou prise de sanglots murmura baouli ce qui signifie en ashanti « l’enfant est mort », origine du nom du peuple appelé Baoulé. Cette reine reste la « mère » de tous les baoulés qui vivent essentiellement aujourd’hui au centre de la Côte d’Ivoire. Après ces instants partagés silencieusement auprès de mon petit compagnon africain, je lui achetais plein de bonbons pour le remercier et je n’oublierais jamais son beau sourire lumineux en croquant ces sucreries aussi colorées que les boubous des africaines.
CONTES
Le roi qui voulait marier sa fille
Un jour un roi eut une drôle d’idée. Désireux de marier sa fille, d’une beauté légendaire, il veut choisir le meilleur prétendant et décide de l’enfermer dans une case sans porte. Cette mise à l’écart l’empêchera de tomber amoureuse. Les servants du palais lui apportent ses repas qu’elle lui donne par une petite fenêtre, d’une taille si réduite qu’aucun homme ne peut s’y glisser. Au printemps arrivent tous les prétendants espérant être l’élu qui épousera la ravissante princesse. Ils n’obtiennent qu’un refus. L’année passe et le roi n’a toujours pas trouvé de gendre. Un matin, en s’approchant de la case de la princesse les servantes entendent des pleurs qui ressemblent fort à celle d’un nouveau-né. Affolées elles s’empressent d’aller voir le roi pour lui conter la nouvelle. Le roi furieux demande à ses gardes d’aller casser le mur de la case et de ramener sa fille au palais pour qu’elle avoue le nom de celui qui a osé l’enceinter. La princesse lui répond que sa case étant plongée dans l’obscurité, il lui a été impossible de voir le visage de celui qui lui rendait visite. Le roi convoque la grande assemblée destinée à confondre le responsable et le tuer. Comme son petit-fils commençe à marcher, chaque homme de l’assistance doit venir chanter une chanson devant l’enfant pour qu’il désigne son père.
Tous les hommes de la tribu chantent et passent devant l’enfant sans qu’il se manifeste. Le roi décide de convoquer les hommes des tribus voisines, mais aucun d’entre eux n’est reconnu par l’enfant. Désespéré le roi convoque les animaux de la forêt pour passer l’épreuve. L’éléphant, le lion, le léopard chantent mais leurs chants apeurent l’enfant. Quand arrive le tour de l’écureuil, l’assemblée rigole, se moque et la foule lance des quolibets au petit animal. Malgré ces vexations, l’écureuil entonne la chanson. Soudain le petit-fils du roi se léve et marche vers l’écureuil en balbutiant « toï to toï ». La foule, reste figée et silencieuse devant cette révélation. Sans que les gardes aient eu le temps de réagir, l’écureuil enléve son fils et disparaît dans les arbres. Dans la fuite, l’enfant laisse tomber son bracelet dans un champ d’arachide. À l’avenir, ne vous étonner point si vous voyez un écureuil fouiner dans un champ d’arachide, c’est parce qu’il cherche le bracelet de son fils mais aussi les graines qui vont les nourrir.
DJIBOUTI
LITTÉRATURE
Poèmes du désert
CHEHEM WATTA
GABON
CINÉMA
OBALI
PIERRE-MARIE DONG et CHARLES MENSAH (1976)
Germaine Djeri (Ngondo), Armel Balthazar Mbimba (Tsougoudja), Othas Brazzo, Jean-Bosco Pinoboumi.
Ce film, dont la scénariste est Joséphine Kama Bongo (femme du président Omar Bongo) montre l’absurdité d’une situation se rattachant à la coutume Obali (d’ou le titre), une vieille tradition oppressive : quand une épouse meurt, le veuf doit se remarier avec une des femmes de sa belle-famille. Mais quand la seule femme est en réalité la petite fille du veuf, celle-ci se voit contrainte d’épouser son grand-père. Cette situation absurde va se poser à Ngondo, une jeune fille qui vit dans un village reculé du Haut-Ogoué, à qui l’on vient annoncer la terrible nouvelle. Elle doit épouser son grand-père comme la tradition le lui impose, mais Ngondo est amoureuse de Tsougoudja, un jeune garçon qui vit à Libreville…
AYOUMA
PIERRE-MARIE DONG et CHARLES MENSAH (1977)
Fidèle Gomez, Charlotte Ndong, Daniel Odimbosoukou, Vicky Tournier, Jean-Bosco Pinobouni.
Ayouma a versé une dot, selon la tradition, pour épouser Ndaouba mais son père veut profiter de cette aubaine, pour utiliser cette dot à des fins personnels et s’offrir une nouvelle épouse. Les jeunes mariés s’y opposent fermement. Ayouma rencontre à plusieurs reprises sa future belle-mère pour lui exposer son point de vue qui est aussi celui de sa femme. Ces rencontres sont mal interprétées, la rumeur éveille des soupçons et conduit au drame : Ayouma est assassiné. Ndaouba continuera à se battre pour libérer les femmes de cette tradition masculine tenace, elle luttera aussi contre une autre tradition, celle d’être considérée comme des femmes-objets, avec une valeur marchande.
AMOUR OU SENTIMENT
VAN MABADI (2011)
Natacha Nzang (Tiffany), Armel Nguimbi (Warren).
Warren et Tiffany forment un couple épanoui qui vit dans la capitale gabonaise. Leur relation explose quand Tiffany surprend Warren en pleins ébats sexuels avec son amie Jessica. Tiffany complètement déboussolée tente même de mettre fin à ses jours. Ben, un soupirant éconduit, revient vers elle et prend en charge les frais médicaux qui vont la remettre sur pieds. Par reconnaissance elle accepte qu’il la courtise, elle reprend goût à la vie et une jolie relation se noue entre eux. C’est alors que Warren réapparaît….
LITTÉRATURE
Fureurs et sentiments
ANGÉLE NTYUGWETONDO RAWIRI
(1989, éd. L’Harmattan)
Ce roman d’Angèle Ntyugwetondo Rawiri (1954-2010), première romancière gabonaise, raconte l’histoire d’un couple où l’homme met à l’écart de sa vie sa femme Émilienne « frappée de stérilité ». En Afrique ce constat, qui est considérée comme une véritable « infirmité », comme un sort, incite Émilienne à aller va voir un guérisseur. Quand on sait à quel point dans la société africaine la femme est d’abord assignée à un rôle de procréation, on peut facilement imaginer la douleur qu’elle ressent dans son corps comme dans sa chair. Cette souffrance sera d’autant plus forte quand son mari Joseph a une maîtresse « son deuxième bureaux », avec qui il a deux enfants. Au fil des pages on sent naître une relation ambiguë entre les deux femmes et le roman prend des chemins de traverses. Emilienne comble son vide affectif et son désert sexuel, en redécouvrant le plaisir « par ce cri nouveau de son corps qu’elle peut faire taire à volonté par les caresses qu’elle échange » avec Dominique, la maîtresse de son mari. Une relation qui lui permet, à travers les plaisirs de l’adultère, de ressentir les mêmes émotions que lui.
GUINÉE
DAKAN
MOHAMED CAMARA (1997)
Koumba Diakité, Mamady, Aboubakar Touré, Cécile Bois.
Dans une grande ville d’Afrique Manga et Sory, deux jeunes hommes âgés de vingt ans s’aiment mais la société à laquelle ils appartiennent, très rigide et régulée par de nombreux tabous et interdits, n’accepte pas leur relation amoureuse. Leurs familles tentent de faire respecter leurs principes. Doivent-ils se résoudre à tenter de guérir de cet amour ? Comment faire face aux superstitions et à la calomnie ? On les incite à consulter un marabout pour les délivrer de ce « mal ». Un des premiers films à aborder l’homosexualité en Afrique.
IL VA PLEUVOIR SUR CONAKRY
CHEICK FANTAMADY CAMARA (2007)
Alexandre Ogou (Bibi), Tella Kpomahou (Kesso), Moussa Keita (Imam Karamo).
C’est une histoire, un peu à la manière de Roméo et Juliette, où un couple contemporain se heurte au poids des traditions. Bibi et Kesso s’aiment et attendent un enfant sans être marié. Lui est caricaturiste de presse et elle, informaticienne, concoure pour « miss Guinée ». Ils appartiennent à deux familles que tout opposent. Celle de Kesso est ouverte (son père est directeur du journal où travaille Bibi), celle de Bibi est ultra conservatrice, son père est l’imam de Conakry et il espère bien voir son fils lui succéder. Depuis plusieurs semaines la sécheresse sévit à Conakry. Un bulletin météo annonce l’arrivée de la pluie, mais il est tenu secret par l’Etat qui offre une enveloppe au clergé (dans le but de resserrer ses liens lors des prochaines élections) et lui demande d’implorer la pluie. Découvrant le subterfuge, Bibi en fait état dans son journal. Son père l’apprend, la tension monte quand il découvre que Kesso est enceinte, il refuse l’idée d’un enfant hors mariage une honte pour sa famille. Sur fond de conflits de générations, mêlant le respect de la tradition et le désir de vivre avec son époque, un drame va éclater.
MADAGASCAR
CINÉMA
MALAGASY MANKANY (LÉGENDES DE MADAGASCAR)
HAMINIAINA RATOVOARIVONY (2012)
(Prix du Long métrage jury jeune à Angers en 2013) – Ben Elissar Chazuily, Haminiaina Ratovoarivony, Sanjy Valeska.
Jimi, Bob et Dylan, amis et étudiants à l’université d’Antananarivo, décident de partir avec leur Austin mini. Le but du voyage, accompagner Jimi qui doit se rendre au chevet de son père gravement malade. Ce voyage sera semé d’embûches, de rencontres et ils seront confrontés à la réalité du monde rural malgache qui va les mettre à l’épreuve. Sur le parcours ils prennent en stop une jolie et mystérieuse indo-pakistanaise, mais réussiront-ils à arriver à temps ? Ce road-movie est aussi une histoire d’amour entre quatre jeunes qui partagent un moment d’aventure, d’inconnu et de réflexion sur leur avenir.
LITTÉRATURE
Lalana
MICHÉLE RAKOTOSON
(2002, éd. de l’Aube, cinquième prix du livre insulaire de Ouessant 2003)
Dans la bibliothèque d’un de mes amis journaliste à RFI, j’ai trouvé ce livre de Michèle Rakotson, elle même journaliste à RFI pendant plusieurs années. Il me l’a prêté me confiant qu’il aimait beaucoup son écriture et que l’Académie française venait de lui remettre la grande médaille de la francophonie pour l’ensemble de son œuvre. Comme presque partout en Afrique le sida est une maladie taboue et ce livre en est un vibrant témoignage. Il nous entraîne dans un voyage troublant, un voyage de l’extrême puisqu’il s’agit de l’ultime voyage de Rivo qui, atteint du sida, va mourir. Naivo et Rivo s’aiment, fuient la misère d’Antananarivo, traversent Madagascar et se dirigent vers le littoral. Naivo accompagne son ami jusqu’à la mer qu’il ne connaît pas, elle lui apportera la sérénité nécessaire pour le grand départ et retrouver ses ancêtres. Durant ce terrible voyage Rivo « semble en paix, calme enfin. Ils ont un répit, la vie reprend le dessus, à la mer là-bas, ils verront les vagues, sentiront les embruns … Il lui semble entendre le chant des grillons, à travers les bruits du moteur. Enfant, il aurait grimpé dans un arbre, aurait fouillé dans l’écorce, pris l’insecte affolé pour l’enfermer dans une boîte et écouter sa plainte. Il l’a fait autrefois, un peu plus loin d’ici, il a aussi dévalé les rizières, rêvé de territoires à conquérir … » (p. 89)
MALI
MYTHES ET LÉGENDES
Comme dans toutes légendes ou mythes il existe plusieurs versions, mais celles-ci sont les plus communément relatées.
Mythe de Tapama Djenepo
Ce mythe est l’un des plus connus car il se rattache à la fondation et à la prospérité de Djenné, l’une des principales villes des empires du Mali, qui possède encore aujourd’hui une architecture en terre crue (adobe ou banco) exceptionnelle, d’où son inscription sur la liste du patrimoine mondial de l’Unesco. Djenné signifie « génie des eaux » en langue bozo. La légende raconte qu’après la destruction de la capitale du royaume de Wagadu, les Soninké sont venus s’installer à Djenné. Désireux d’y construire une ville fortifiée pour se protéger de toutes attaques, ils choisissent de l’édifier en banco. Mais à chaque tentative de construction les murs s’écroulent comme un château de sable. Interpellés par cette catastrophe, ils se décident à consulter un oracle pour conjurer le mauvais sort. Ils comprennent que le génie des eaux est en colère et l’oracle suggère de le calmer en lui offrant un sacrifice humain. Tapama, une très belle jeune fille est désignée, elle doit être emmurée vivante pour retenir les murs. Pour sauver sa famille et son peuple Tapama accepte le sacrifice. Tout le monde veut rendre hommage à son acte d’amour et tous décident que le jour de la cérémonie elle sera habillée comme une princesse. Son sacrifice a lieu le septième jour du mois lunaire. Des jeunes filles l’accompagnent et Tapama chante : « ….Je suis fière de mourir pour mon village… ». Des larmes perlent sur son visage quand on la remet aux bâtisseurs. Ils se mettent sans tarer à l’œuvre et commencent à construire les murs. Tapama a de l’eau jusqu’au genoux, mais le fleuve est toujours en furie. Les eaux atteignent son cou et la rivière ne cesse d’être tourmentée. Quand Tapama disparaît, complètement engloutie, le génie des eaux se calme et le chant de Tapama s’est tu à jamais. Le deuil dure sept ans, sept mois et sept jours. Depuis sa disparition, quand quelqu’un entonne la « chanson de minuit » chantée par Tapama, la tradition veut que l’on entende son souffle, léger comme un murmure, à Kanafa un quartier de Djenné.
Mythe de Mali-Sadio
Tous les mythes se rattachent à une tradition orale encore très présente dans les villages d’Afrique. Celui de Mali et Sadio est toujours conté et chanté par des griots et repris par des chanteurs maliens. Après la mort de Tapama son fiancé Mali, désespéré du sort jeté à sa bien-aimée, s’enfuit et se métamorphose en hippopotame (mali en langue bamanan). Il quitte les rives du Bani, s’exile à Bafoulabé, une commune du pays Khasso, dont le nom signifie en bambara « rencontre de deux fleuves ». Bafoulabé se situe à la confluence des deux rivières Bafing et Bakoye qui forment le fleuve Sénégal où Mali a choisi de vivre. Il rend des services aux pêcheurs en leur indiquant les lieux poissonneux et sur son gros dos il aide les habitants à traverser d’une rive à l’autre. Très aimé, on le surnomme « le cheval de la rivière ». Un jour l’hippopotame aperçoit sur les berges une belle jeune fille (Sadio) qui vient puiser de l’eau et se baigner. Mali tombe amoureux, ils sympathisent et s’aiment à un tel point qu’ils deviennent inséparables. Jusqu’au jour où arrive sur les berges un autre pachyderme. Personne ne remarque de différence avec Mali, aussi les villageois comme d’habitude veulent chevaucher l’animal pour traverser la rivière. L’hippopotame entre en furie, tue et blesse plusieurs d’entre eux, les hommes décident de le tuer. Un peu plus tard des chasseurs de Guinée leurs révèlent leur méprise, Mali est de retour. Cependant, jaloux de sa relation amoureuse la belle Sadio qu’ils aimeraient pouvoir séduire, ils décident de le tuer. Sadio, apprenant la mort de son amant, met fin à ses jours. Aujourd’hui sur la grande place de Bafoulabé trône l’immense statue du pachyderme, c’est vous dire combien le mythe de Mali et Sadio est encore vivant au Mali.
ÎLE MAURICE
CINÉMA
LES ENFANTS DE TROUMARON
HARIKRISHNA ANENDEN ET SHARVAN ANENDEN (2012)
Adapté du livre Éve de ses décombres d’Ananda Devi (2002, éd. De l’Aube) – Kitty Philips (Éve) Roshan Hassamal (Sad), Vinaya Sungkur (Savita), Kristeven Moutien (Clélio).
Le roman comme le film dénoncent ou plutôt font entendre le cri d’une jeunesse désœuvrée, entourée par un quotidien violent et qui pourtant a l’avenir devant elle. La violence et la détresse qui émanent de cette jeunesse, qu’elle soit de Liverpool à Calcutta, de la banlieue parisienne à Port Louis, la capitale de l’île Maurice, sont universelles. C’est pourquoi ce film est à la fois poignant de vérité et dérangeant. Voir la réalité en face dérange toujours… Le film raconte l’histoire de quatre jeunes gens âgés de 17 ans, deux garçons Sad et Clélio, deux filles Eve et Savita. À l’âge où l’on est encore plein d’insouciance et de projets, ils ont déjà le désespoir accroché au cœur et le sentiment que leur vie bascule dans le vide. Et pourtant, ils voudraient bien s’accrocher à leurs rêves. Eve, pour s’acheter des livres scolaires et survivre vend son corps sans limite, Sad amoureux d’Eve voudrait la protéger. Depuis qu’il a découvert Rimbaud, qu’il lit toutes les nuits, il veut être poète. Savita est une jeune fille sage qui espère pouvoir empêcher Eve de sombrer sur la voie dangereuse qu’elle à prise et qui ne peut que la conduire à sa perte. Clélio est un voyou marginal sans illusion, révolté contre lui-même et contre la société qui l’entoure. Ils voudraient tous les quatre pouvoir fuir, mais comment faire « avec des ailes de plomb » pour s’envoler ailleurs ? Le destin ne peut qu’être tragique.
LITTÉRATURE
Éve de ses décombres
ANANDA DEVI
(2006, éd. Gallimard, prix Inter et des Cinq continents de la Francophonie)
L’île Maurice, autrefois Isle de France, est avec son lagon turquoise une des perles de l’Océan indien, une destination idyllique rêvée par des milliers de touristes de la planète. Avec ce livre la romancière m’a pris par la main et m’a incitée à écarter le rideau pour voir l’envers du décor. Comme dans tous les pays en voie de développement il y a la part d’ombre et la part de lumière. Ananda Devi nous dévoile cette part d’ombre, violente et désespérée, d’un quartier défavorisé de Port-Louis, la capitale, appelé : « Troumaron, c’est une sorte d’entonnoir ; le dernier goulet où viennent se déverser les eaux usées du pays. » Un ancien marécage comblé où : « on recase les réfugiés des cyclones, ceux qui n’ont pas trouvé à se loger après une tempête et qui, deux ou cinq ou dix ou vingt ans après, ont toujours les orteils à l’eau et les yeux pâles de pluie » Ananda Devi donne la parole à quatre jeunes gens âgés de 17 ans, deux garçons Sad et Clélio, deux filles Eve et Savita. À l’âge où l’on est encore plein d’insouciance et de projets, ils ont déjà le désespoir accroché au cœur et le sentiment que leur vie bascule dans le vide. Et pourtant ils voudraient bien s’accrocher à leurs rêves. Eve, pour s’acheter des livres scolaires puis survivre vend son corps, Sad amoureux d’Eve voudrait la protéger. Depuis qu’il a découvert Rimbaud, qu’il lit toutes les nuits, il veut être poète. Savita est une jeune fille sage qui espère pouvoir empêcher Eve de se perdre. Clélio est un voyou, il est en rage contre lui-même et contre la société qui l’entoure. Ils voudraient tous les quatre pouvoir fuir, mais comment faire « avec des ailes de plomb » pour s’envoler ailleurs ? Le destin ne peut qu’être tragique.
NIGER
TOULA OU LE GÉNIE DES EAUX
MOUSTAPHA ALLASANE et ANNA SCHOERING (1973, restauré du négatif original)
Inspiré du conte de Boubou Hama sur la sécheresse. Solange Delanne, Isaa Bania, Parfait Kondo, Sotigui Kouyaté, Damouré Zika (film interdit quelques temps par les autorités du Niger)
La sécheresse sévit et le sorcier annonce que pour apaiser la colère des dieux il faut sacrifier une jeune fille au génie des eaux. Un jeune garçon amoureux de la jeune fille désignée par le devin, part pour trouver de l’eau, dans l’espoir de revenir à temps pour la sauver. Il arrive profondément heureux et chargé d’eau, mais il est trop tard. Qui sortira le pays de ce fléau ? Les sorciers blancs et modernes avec leurs bulletins météos ou le sorcier noir qui oblige un rituel lié au sacrifice humain ?
L’EXILÉ
OUMAROU GANDA (1980)
Zaïka Souley, Damouré Zika, Ousseimi Bedari, Oumarou Ganda.
Ce dernier film réalisé par Oumarou Ganda (1935-1981) s’inspire d’un conte africain. Un ex ambassadeur en exil aime raconter cette histoire traditionnelle. Il était une fois un roi qui aimait se promener déguisé afin d’écouter, sans être reconnu, les souhaits ou critiques de son peuple. Un jour il surprend une conversation entre deux frères qui se disent prêts à se faire décapiter pour vivre une nuit avec une des filles du roi. Le roi les prend au mot et leurs offrent ses filles en mariage. Un an plus tard le roi leur rappelle la parole donnée. L’un des frères accepte d’être décapité et l’autre, selon les conseils de sa femme, s’enfuit avec elle. Ils voyagent, vivent de nombreuses aventures et mésaventures jusqu’à ce qu’il se retrouve roi à son tour d’un pays. Cependant, il n’arrive pas à jouir de son statut privilégié, la promesse donnée et non tenue le hante. Pour protéger sa famille, il accepte de mourir sacrifié à son tour et ainsi de ne pas faillir à la parole donnée, une valeur sacrée en Afrique.
AUBE NOIRE
DJINGAREYE MAIGA (1983)
Damouré Zika, Salah Sannousi, Amina Sidibe, Zalika Souley.
Omar l’africain revient au pays avec une femme blanche et un enfant, mais son retour ne va pas se passer comme il espérait. Avec cette étrangère, il n’est pas le bienvenu et sa famille à une réaction radicale. Elle le force à divorcer de cette femme qui en plus est chrétienne et monogame. Ses parents lui propose une remplaçante, une jolie cousine, qui sait s’y prendre pour le séduire. Il accepte et se marie. Mais la mariée, qui n’est plus vierge, est répudiée sur-le-champ. Désespérée, elle tue son enfant et est accusée d’infanticide. Omar désemparé tente de retourner vers sa première épouse. Un drame conjugal où pèse le poids du pouvoir de la famille.
RÉPUBLIQUE DU CONGO
RAMATA
LÉANDRE-ALAIN BAKER (2007)
(Adapatation du roman éponyme de l’écrivain sénégalais Abasse Ndione) – Katoucha Niane (Ramata), Ibrahima Mbaye Sopé (Ngor Ngong) , Ismaël Cissé (Matar).
Ramata a tout pour être heureuse. Mariée depuis une trentaine d’années au ministre de la justice Matar Samb, elle méne la vie luxueuse de la grande bourgeoisie dakaroise. Jeune grand-mère depuis peu, sa vie semble comblée jusqu’au jour où elle prend un taxi, son mari étant parti en mission. Elle accepte de prendre un verre avec Ngor Ngong le chauffeur du taxi, un petit malfrat beaucoup plus jeune qu’elle, qui réussit à la séduire. À 50 ans, elle découvre l’amour dans ses bras et une passion torride va donner un virage tragique à sa destinée. Cette relation sensuelle l’a rend esclave de son corps et de son amant. Elle comprend que le décor et le confort dans lequel elle vit ne sont qu’illusions, alors pourquoi ne pas vivre intensément et sans retenu cet amour. Mais le réveil sera brutal. Ngor Ngong a-t-il surgi par hasard dans sa vie ? Peut-être aurez-vous l’impression d’avoir vu Katoucha Niane, surnommée la « princesse peule », ailleurs que sur les écrans. Ce film a été sa première et unique apparition au cinéma, elle est surtout connue pour avoir été l’un des premiers tops-models noirs et l’égérie d’Yves Saint Laurent.
LITTÉRATURE
Je suis heureuse d’évoquer la littérature de la République du Congo en vous annonçant un bel événement. Car il s’agit bien d’un événement littéraire. J’ai appris hier (17 mars 2016) avec beaucoup d’émotion que le grand écrivain poète franco-congolais Alain Mabanckou, auteur d’une vingtaine d’ouvrages dont Mémoires d’un porc épic, (prix Renaudot 2006), Demain J’aurais vingt ans (2010), Le Sanglot de l’Homme Noir (2012) a été nommé à la chaire de création artistique du Collège de France. Chaque mardi pendant un an l’écrivain va parler, au sein de cette prestigieuse institution qui remonte à François 1er (1530), de la « Littérature africaine de langue française ». C’est la première fois que cette chaire, créée en 2005, est occupée par un romancier.
La légende de l’errance
ALAIN MABANCKOU
Alain Mabanckou né en 1966 à Pointe-Noire n’ayant pas eu la possibilité d’assister aux obsèques de sa mère écrit, dans l’urgence du remord qui le taraude, un récit poème en trois jours. Les mots s’imposent, l’écriture étant la seule façon pour le poète de rendre hommage à sa mère qu’il considère comme la femme la plus importante de sa vie. N’ayant pas pu l’accompagner dans ses derniers instants elle s’est éteinte dans une grande solitude, il lui témoigne son amour en lui adressant une missive posthume. Elle qui a été, il ne cesse de le répéter, à la fois un modèle et une muse : « J’irai planter l’arbre de ma douleur sur les terres humides du silence près de sa tombe. J’habiterai les buissons de lantanas. Je tournerai le dos au soleil au jour pour n’entendre que le timbre de sa voix au milieu de la nuit »
SÉNÉGAL
CINÉMA
XALA
OUSMANE SEMBENE (1975)
Adapté de son roman homonyme – Thierno Lèye (El Hadji Abdou Kader Beye), Myriam Niang (la fille d’El Hadji) Seune Samb (première épouse), Younousse Sèye (seconde épouse), Dyela Touré (troisième épouse), Douta Seck (l’aveugle).
La malédiction a-t-elle frappée à la porte du riche El Hadji Abdou Kader Beye ? Le soir de sa nuit de noce avec sa troisième épouse, il est frappé d’impuissance. Il s’imagine victime du « xala », un châtiment infligé par un paysan qu’il aurait jadis ruiné. Humilié, il consulte les marabouts car l’impuissance sexuelle est vécue comme une tragédie pour un africain. Commence alors une descente aux enfers, qui va l’amener à une banqueroute professionnelle et à une solitude sentimentale.
MOOLAADÉ
OUSMANE SEMBENE (2004)
Prix Un certain Regard au Festival de Cannes – Fatoumata Coulibaly (Collé Ardo Ardo Sy), Salimata Traoé (Amasatou).
Si ce film n’est pas a proprement parlé un film d’amour, il dénonce un rituel qui se rattache à la sexualité féminine et à l’acte d’amour. Rebelle contre la tradition ancestrale de l’excision (le Salindé) Collé Ardo a refusé que ce rite, qu’elle considére barbare, soit imposé à sa fille unique Amasatou. Sa démarche se répand dans le pays et quatre fillettes viennent chez elle pour lui réclamer un droit d’asile (le Moolaadé) et les protéger de ce rituel que beaucoup s’obstinent à appeler « purification ». Collé Ardo lutte pour ses convictions et quand son mari, qui tente violemment de la faire fléchir, finira par accepter que le changement est dans l’ordre des choses, il sera accusé de trahir les hommes. Il leur répondra : « le pantalon, à lui seul, ne fait pas l’homme ». Ce combat des valeurs est un film à charge et militant.
UN AMOUR D’ENFANT
BEN DIOGAYE BÉYE (2005)
Anta Sylla (Yacine), Mafall Thioune, Séga Bèye, Habib Diara, Fatou Diouf, Mamadou Sané, Omar Seck, Fatou Fall.
Des enfants de la ville s’amusent, vont au même collège et découvrent les premiers émois amoureux. Omar croit aimer Yacine mais il n’est pas sûr d’être aimé d’elle. Il décide de lui écrire une lettre d’amour mais, insouciant, il la perd dans l’enceinte du collège en ayant oublié de mettre l’adresse. Le professeur trouve la lettre et la fait lire en classe, Yacine est furieuse. Les deux adolescents ne se parlent plus puis ils finissent par se retrouver et Omar invite Yacine au bal. Quand arrivent les vacances ils sont séparés et avant de se quitter ils décident de communiquer la nuit en regardant la lune en même temps. Un film tendre et poétique.
LITTÉRATURE
ROMAN
Une si longue lettre
MARIAMA BÂ (1929-1981)
(éd. Le Serpent à plumes, 1979)
Un jour au Sénégal j’ai eu une conversation qui m’a beaucoup troublée. Sur une plage idyllique en Casamance j’ai rencontré une jolie femme, aux seins déjà fragilisés par de nombreuses maternités. La discussion s’engagea facilement et très vite elle me demanda si j’étais mariée ? : « Non, pas encore. J’ai trente ans et je veux continuer à voyager avant d’avoir un mari et des enfants ! ». Elle se mit à rire et surprise elle me dit « tu seras trop vieille pour trouver un mari et être enceintée ! Ici les hommes veulent toujours avoir une femme jeune auprès d’eux !». A mon tour je l’interrogeais : « Et toi tu es mariée ? « Bien sûr, depuis mes 14 ans ! » Interpellée par ce qu’elle venait de me confier, elle me précisa « j’ai 25 ans, 6 enfants et je suis la 3ème épouse de mon mari, mais ici les hommes décident de tout et nous on aimerait bien que ça change ». La polygamie je n’en connaissais que le mot et, ignorante de cette coutume locale, je restais songeuse, troublée, choquée. Je suis allée me baigner avec un ressenti étrange. Quand dans une librairie de Dakar je suis tombée sur ce roman de Mariama Bâ qui parlait de la polygamie, je l’ai acheté, oublié dans un tiroir et retrouvé beaucoup plus tard.
Mariama Bâ a choisi d’écrire son roman sous la forme originale d’une relation épistolaire entre deux amies (27 lettres). Ramaloutaye, la narratrice, vient de perdre son mari et, selon la tradition sénégalaise 40 jours de deuil lui sont imposés. Elle saisit cette occasion pour écrire à sa meilleure amie Aïssatou, divorcée et vivant aux Etats-Unis. Toutes les deux elles ont été première épouse puis leur mari, au nom de la sacro-sainte tradition et volonté de l’homme, leur ont imposé une coépouse plus jeune qu’elle, Binetou et la petite Nabou. L’une comme l’autre ont mal vécu cet amour partagé, sans avoir la liberté de dire non. A travers cette correspondance Mariama Bâ, première femme de lettres au Sénégal, nous livre les états d’âme de Ramaloutaye au fil de sa vie. C’est un roman à charge contre la polygamie.
Riwan ou le chemin de sable
KEN BUGUL
(éd. Présence Africaine, 1999 – Grand Prix littéraire de l’Afrique noire)
Mariètou Mbaye Bilèoma de son vrai nom, signe ses romans sous le pseudonyme de Ken Bugul qui signifie en wolof « celle dont personne ne veut ». J’ai choisi de rebondir sur la même thématique que l’ouvrage précédemment cité Une si longue lettre, en vous conseillant de lire Riwan ou le chemin de sable, où la polygamie est abordée à travers le vécu personnel de l’auteur, avec un autre regard, une autre sensibilité. La plume de Ken Bugul plonge dans l’encre de la vie, elle grince, elle interpelle, elle choque, elle est sincère et remue les cœurs. C’est aussi une plume chaude, sans détour.
Ken Bugul, qui a peu connu son père âgé de 85 ans à sa naissance, a obtenu une bourse pour aller étudier en Belgique. De retour dans son pays natal, après une expérience européenne scandée par des désillusions, elle se prend d’amitié pour un marabout, polygame mais considéré comme un sage, dont elle devient la 28éme épouse. Curieusement, et il est difficile pour une femme européenne de le comprendre, cette nouvelle vie va lui permettre de se reconstruire et de retrouver son identité. Bien sûr, partager un amour, est une chose difficile mais ce marabout, le « Serigne » (chef spirituel en wolof), a de la bienveillance pour chacune de ses femmes qui ne manque de rien. L’auteur, dont c’est le récit autobiographique, invite le lecteur à suivre les traces du chemin de sable qui conduit à la chambre du « Serigne » où l’intimité du récit prend un ton d’une grande sensualité. Ce livre incite le lecteur à réfléchir sur la vie de couple, l’hypocrisie de bien des couples monogames, la contrainte « officialisée » pour les femmes africaines d’accepter la polygamie et d’être traitées comme un objet monnayable par leur famille.
Trois femmes puissantes
MARIE NDIAYE
(éd. Gallimard, Prix Goncourt 2009)
Ce roman se présente plus exactement comme une suite de trois récits qui mettent en scène la vie de trois femmes mal aimées, fragilisées par la vie, l’exil et la solitude. Leur point commun ? Avoir eu la force de dire non. Quand leur destin bascule elles puisent en elles une énergie qui leur permet d’avancer, de se reconstruire. La première Norah, avocate à Paris, se rend à la demande de son père à Dakar pour une affaire de famille. La deuxième Fanta, venue habitée en France avec son mari, malheureuse et déracinée se mure dans un silence. La troisième Khady, dans l’impossibilité d’avoir enfantée en trois ans de mariage, se retrouve veuve et méprisée pas sa belle-famille. Un jour celle-ci la somme de rejoindre un homme qu’elle ne connaît pas. Elle part sur une embarcation de fortune qui probablement n’arrivera jamais à destination.
POÉSIE
Bigaro Diop (1906-1989)
Ecrivain et poète de la négritude, il a cherché à sauvegarder à travers l’écrit les contes traditionnels se rattachant à la littérature orale africaine. Ses ouvrages les plus connus Les Contes d’Amadou Koumba (1947), les Nouveaux Contes d’Amadou Koumba (1958), Contes et Lavanes (1963). Leurres et Lueurs (1960), recueil de poèmes (éd. Présence Africaine)
Choix de poème :
A quoi tient l’Amour ?
Pour René Florio (Anthologie Six poètes d’Afrique francophone (éd. Points 2O10)
Léopold Sédar Senghor (1906-2001)
Lors d’un voyage au Sénégal, qu’elle ne fut pas ma surprise de découvrir, en traversant le port de Joal, situé au sud-est de Dakar à la pointe de la Petite-Côte, qu’en ce lieu était né le grand poète Léopold Sédar Senghor. En parlant avec des Sénégalais, qui vouaient une admiration sans borne au poète, considéré comme le plus grand poète noir d’expression française, ils me rappelaient avec fierté qu’il avait été le premier Président de la République du Sénégal de 1960 à 1980. Avant d’être élu à l’Académie française en 2003 Léopold Sédar Senghor, chantre de la négritude, avait reçu de nombreux prix qui couronnaient son parcours exceptionnel. Parmi eux citons : le Grand prix international de poésie de la Société des poètes et artistes de France et de langue française (1963), le prix littéraire de l’Académie internationale des arts et lettres de Rome (1969), le prix international du livre, attribué par le Comité international du livre (Communauté mondiale du livre, UNESCO, 1979), le prix Guillaume Apollinaire (1974) ; prince en poésie 1977, décerné par l’association littéraire française L’Amitié par le livre, UNESCO, 1979) ; le premier prix mondial Aasan ; le prix Alfred de Vigny (1981). Il était docteur Honoris Causa de 37 universités.
Parmi ses recueils de poésie citons : Chants d’ombre (1945) ; l’ Anthologie de la nouvelle poésie nègre et malgache de langue française, précédée de Orphée noir de Jean-Paul Sartre (1948) qui donne une « définition philosophique » de la poésie de la négritude : « il s’agit d’une quête, d’un dépouillement systématique et d’une ascèse qu’accompagne un effort continu d’approfondissement. Et je nommerai « orphique » cette poésie parce que cette inlassable descente du nègre en soi-même me fait songer à Orphée allant réclamer Eurydice à Pluton ». Hosties noires (1948), Ethiopiques (1947-1956), Nocturnes (1961), Lettres d’hivernage (1973), Élégies majeures (1979), Œuvre poétique (1990).
Choix de poèmes :
« Femme noire », est l’un de ses plus beaux poèmes et aussi l’un des plus célèbres. Ce poème est lié à une jolie anecdote d’un de mes voyages au Sénégal. Je l’ai découvert un jour au hasard d’une promenade en Casamance. Je marchais sur une plage et je tombe sur un recueil de poésie francophone qui semblait avoir été oublié sur le sable par un promeneur. En fait, je n’étais pas sûre que la personne l’ai vraiment oublié. Je me suis autorisée à le feuilleter furtivement et le seul poème que j’ai eu le temps de lire était Femme nue, j’étais troublée par la beauté de l’écriture. Le propriétaire du livre est arrivé, il a sourit et était heureux de savoir combien ce poème m’avait émue. Vous pouvez trouver ce texte, ainsi que celui de « Avant la nuit », dans Anthologie, Six poètes d’Afrique francophone (éd. Points 2010)
Femme noire (extraits de Chants d’ombre, 1945)
Regrets
Avant la nuit (extraits de Lettres d’hivernage, 1973)
TCHAD
CINÉMA
DARATT (SAISON SÈCHE)
MAHAMAT SALEH HAROUM (2006)
Prix spécial du jury du festival de Venise – Ali Bacha Barkaï (Atim), Youssouf Djaoro (Nassara), Aziza Hisseine.
Après quarante ans de guerre civile le Tchad est anéanti par la guerre, la famine et la sécheresse. Le gouvernement décide l’amnistie et libére tous les criminels de guerre. Le pays est dévasté, les cœurs sont ravagés. Comment cohabiter après la guerre ? Atim, 16 ans, est chargé par son grand-père d’aller exécuter celui qui a tué son père. Il se rend à N’Djaména où il cherche l’homme à abattre. Il trouve Nassara, l’ancien criminel de guerre, devenu boulanger. Il réussit à se faire embaucher à la boulangerie. Commence alors une étrange relation entre les deux hommes. Atim se prépare à passer à l’acte, mais il attend le moment opportun. Au fil des instants partagés dans une sorte de huit clos, le boulanger est intrigué par son apprenti orphelin. Des jeux d’ombre et de lumière sur leurs visages, une atmosphère étouffante, un travail dur et un dialogue minimaliste, contribuent à créer une certaine tension. Si Atim semble éprouver une affection secrète et ambigüe envers Nassara, qui pourrait être le père qu’il n’a jamais eu, il reste tiraillé entre la vengeance et le pardon, entre pulsions de vie et pulsions de mort. Les sentiments vont évoluer et l’emporter, le film nous révèle une très belle histoire sur le pardon.
LITTÉRATURE
Comme des fléches
KOULSY LAMKO (pièce de théâtre)
Bouba vient de mourir du sida, abandonné de tous sauf de sa dernière compagne Amina, mariée, qui l’a accompagnée jusqu’au bout. La pièce se présente comme un dialogue entre le monde des morts et celui des vivants. Amina se remémore sa liaison ponctuée de moments heureux et douloureux, qui défilent dans sa mémoire comme un rêve ou un cauchemar. Puis vient le moment de la confession à son mari, de lui avouer qu’elle est atteinte du sida et qu’elle n’y survivra pas. Une histoire d’amour tragique qui n’a d’autre issue que la mort des deux amants.
TOGO
LITTÉRATURE
Coca cola Jazz
KANGNI ALEM
(2002, éd. Dapper, Grand prix littéraire de l’Afrique noire en 2003)
C’est l’histoire de demi-sœurs, Héloïse une jeune métisse qui vit à Paris et Parisette qui vit en Afrique. L’une est blanche miel, l’autre noire caramel, elles sont à l’image des deux couleurs des noix de cola auxquelles renvoie le titre. Elles ont le même père, un chercheur d’or volage. Héloïse aimerait connaître ce père dont elle a perdu la trace. Un jour il l’invite à venir en Afrique. Elle débarque à Ti Brava, un petit pays soumis à la dictature de Yamatoké, le président-régnant, où Parisette l’accueille. Cette quête du père, d’identité et d’amour va se révéler complexe. « A quoi ça sert un père, à part faire saigner les cœurs ? » s’interroge Héloïse.