Le bengali ou bangla est une langue indo-iranienne (sous-branche indo-aryenne) de la famille des langues indo-européennes. Avec l’assamais, il s’agit de la plus orientale des langues indo-européennes.
Originaire de la région du Bengale à l’Est du sous-continent indien, première langue parlée au Bangladesh (en 2011, 76 % de la population l’ayant comme langue maternelle, soit 106 millions de locuteurs ainsi que 13,8 % en tant que seconde langue, soit 19 millions de locuteurs, pour un total de 126 millions de locuteurs) et 2e langue parlée en Inde (environ 94 millions de locuteurs langue maternelle), le bengali est la langue nationale du Bangladesh et langue officielle dans les États indiens du Bengale-Occidental, Tripura et certains districts d’Assam. En outre, il est parlé par d’importantes communautés en Amérique du Nord, Europe, Moyen-Orient, Sud-Est asiatique.
C’est la langue maternelle d’environ 200 millions de locuteurs (5e ou 6e rang au niveau mondial).
BANGLADESH
Au printemps 1956, les cinéphiles du monde entier découvrent au Festival de Cannes « Pather Panchali » (La Complainte du sentier), le premier film du réalisateur bengali Satyajit Ray (1921-1992). Personnalité incontournable de la culture bengalie doué de talents multiples (musicien, éditeur, nouvelliste, dessinateur, scénariste…), il est aujourd’hui le réalisateur indien le plus célèbre. Cependant, dans son pays sa popularité lui venait de ses nouvelles, ses dessins et sa musique, ses films n’étant souvent vus que par une élite intellectuelle. Le cinéma Bengali jouit d’une notoriété particulière, considéré par les spécialistes comme le plus « culturel » des cinémas indiens. Rabindranath Tagore, le plus illustre des écrivains indiens, Ravi Shankar, un autre « géant de la culture bengalie » et Satyajit Ray, considérés par les occidentaux comme les artistes indiens les plus importants du XXè siècle, sont issus d’une classe sociale dite des bhadralok. Instruite, fortunée et parlant anglais, cette élite bengalie constituait une passerelle entre les colons – leurs suzerains – et la collectivité. Il n’est pas anodin de rappeler que dans l’histoire de l’Inde Calcutta, a été le premier point d’ancrage des Anglais en Inde au XVIè siècle puis de la toute puissante « East India Company » au XVIIIè siècle. Devenue une riche cité britannique Calcutta sera, pendant cent ans (1858-1947), la capitale de l’empire britannique des Indes. Ville ouverte sur le monde, elle regroupe à cette époque l’élite intellectuelle, Rabindranath Tagore reçoit le Prix Nobel de littérature en 1913.
BIDYAPATI/VIDYAPATI
DEBAKI BOSE (1937, noir et blanc)
Prithviraj Kapoor (le roi Shiva), Chhaya Devi (la reine Laxshmi), Kanan Devi (Anuradha), Pahani Sanyal (Bidyapati)
Ce film retrace la vie du saint et poète de cour vishnouite au XVIè siècle. Le roi Shiva Shingha invite à la cour son ami Bidyapati, poète et musicien, accompagné de la belle Anurhada, sa fidèle disciple. La reine Laksmi, également très belle, se prend d’amour pour le poète et ses sentiments n’échappent pas à son mari. Désespéré, le roi se désintéresse du royaume et laisse filer les affaires de l’état. Sa femme, déchirée par ses sentiments, lui fait comprendre que cet amour est platonique et qu’il n’a pas besoin de réciprocité. Le roi et la reine, par sens de l’honneur et ne trouvant pas de solution à une situation émotionnelle insoutenable, décident de mettre ensemble fin à leurs jours. Un film d’une dimension humaine poignante
APUR SANSAR (LE MONDE D’APU)
SATYAJIT RAY (1959, noir et blanc)
Soumitra Chattertje (Apu), Sharmila Tagore (Aparna), Swapan Mukherjee (Pulu), Aloke Chakravarty (Kajal)
L’œuvre cinématographique de Satiajit Ray (1921-1992), comprend 31 longs-métrages, 2 courts-métrages et 4 documentaires. Troisième et dernier volet de la célèbre trilogie d’Apu, chronique d’un jeune garçon pauvre du Bengale dont on suit la vie depuis l’enfance à l’âge adulte – les deux premiers volets étaient la complainte du sentier (Pather Penchali, 1955) et l’Invaincu (Aparajito, 1956) – dont la musique des trois films a été écrite par Ravi Shankar. Satiajit Ray ne tarda pas à être consacré par ses pairs comme l’auteur d’une oeuvre unique, devenue quasi mythique au fils des décennies.
« Le Monde d’Apu » se situe dans le Calcutta dans les années 1930. Apu a 20 ans et, après la mort de ses parents, il vit dans un logement misérable. Faute d’argent il a dû interrompre ses études, mais une revue littéraire vient d’accepter de publier l’un de ses textes. Alors qu’il cherche en vain un emploi il retrouve Pulu, un ami d’enfance, qui lui propose de l’inviter au mariage de sa cousine Aparna. Mais au cours de la cérémonie le marié est pris d’une crise de folie et le mariage est annulé. Apu propose à la jeune femme de l’épouser pour lui éviter de rester célibataire toute sa vie, selon la coutume. Contre toute attente ils forment un couple uni, au départ fortuitement et sans avoir eu le temps de s’aimer, ils vont se découvrir et vivre un bel amour. Enceinte, Aparna accouche mais elle meurt chez sa mère en mettant son enfant au monde. Apu, désespéré, refuse de voir son fils, Kajal. Il travaille dans une usine, erre et disparaît. Pulu part à sa recherche et le retrouve travaillant dans une mine de charbon. Il le persuade d‘aller chercher son fils qui a maintenant cinq ans. Apu accepte mais les premiers moments sont difficiles, puis une confiance naît entre eux, ils vont se découvrir et il va devoir « l’apprivoiser ». Le Monde d’Apu est une poignante histoire d’amour et de deuil.
CHARULATA (THE LONELY WIFE)
SATIAJIT RAY (1964, Ours d’argent à Berlin, restauré il a été présenté dans la section « Cannes Classics » en 2013) Adapté de la nouvelle Nastanirh (le Nid brisé, 1901) de Rabindranath Tagore
Mhadabi Mukherjee (Charulata), Sailen Mukherjee (Bhupati Dutt), Soumitra Chatterjee (Amal), Shyamal Ghoshal (Umapada, Goetali Roy (Mandakani)
L’histoire se passe vers 1880 dans la grande bourgeoisie libérale bengalie et le film est considéré comme l’un des chefs-d’œuvre du réalisateur. L’héroïne Charulata, qui vit dans son palais victorien de Calcutta, est déchirée par une histoire d’amour impossible. Délaissée par Bhupati Dutta, son époux, un riche héritier féru de politique et entièrement voué à son journal La Sentinelle, Charulata est attirée, au premier abord intellectuellement, par Amal, le cousin de son mari et leur hôte. Bhupati, en homme cultivé, a décelé chez sa femme un talent d’écriture et il l’encourage à persévérer dans ce domaine, aidé par Amal. Les deux jeunes gens se plaisent à des exercices littéraires et écrivent chacun une nouvelle publiée dans la revue de Bhupati. Charulata et Amal ressentent une véritable attirance l’un vers l’autre. Le cinéaste braque sa caméra sur la belle et captivante Charulata afin de saisir la moindre de ses émotions retenues. Mais Amal, troublé lui aussi par cette confusion des sentiments qu’il n’arrive pas à maîtriser, préfère partir. Un certain temps passe jusqu’au jour où elle reçoit une lettre d’Amal, qu’elle avait essayé d’oublier. Elle fond en larmes et Bhupati qui n’est pas dupe, prend conscience du profond désespoir de sa femme et comprend qu’elle aime Amal. Si ce huit clos suggèrent les sentiments sans les avouer, il montre aussi que le désarroi de Charulata ne tient pas seulement à la fuite d’Amal. Il tient aussi au fait que son mari la confine dans une existence bourgeoise insipide, alors qu’elle souhaiterait qu’il lui donne l’opportunité d’avoir un rôle dans son journal. Charulata s’inscrit dans une période au cours de laquelle Satyajit Ray signe plusieurs magnifiques portraits de femmes, appartenant à la moyenne bourgeoisie citadine et luttant entre tradition et modernité.
TITASH EKTI NADIR NAAM (LA RIVIÈRE TITASH)
RITWIK GHATAK (1973, noir et blanc) Inspiré du récit d’Advaita Malla Barman
Rosy Samad (Basanti), Prabir Bitra (Kishore), Kaberi Choudhury (Rajar Jhi), Roshan Jamil (la mère de Basanti)
Au bord de la rivière Titash vit une communauté de pêcheurs qui doit se résoudre à abandonner leur village, la rivière, source de vie et enjeu de profits, étant asséchée. À propos de son film le cinéaste confie : « Titash a été très lié dans mon esprit à beaucoup d’évènements dont je fus le témoin durant mon enfance. » « Notre civilisation est fondée sur les rivières. Titash (…) c’est une force nourricière. La rivière est en train de mourir – un jour, elle se trouve complètement à sec et les pêcheurs sont dépossédés de leur « île » qui émergeait au-dessus de l’eau. C’est alors que les paysans prennent l’avantage. » Kishore vient de se marier et il revient parmi les siens avec sa jeune épouse quand, soudain, celle-ci est enlevée par des pirates. Réussissant à s’enfuir, elle est recueillie dans un village où elle élève seule son enfant. Mais Kishore suite à sa disparition a perdu la raison. Ils ne se retrouveront et ne se reconnaîtront que quelques instants avant de mourir. La musique apporte une dimension dramatique et renforce la beauté du film.
LA MAISON ET LE MONDE (GHARE-BAIRE)
SATYAJIT RAY (noir et blanc, 1984) d’après le roman de Rabindranath Tagore
Soumitra Chatterjee (Sandip Mukherjee), Victor Banerjee (Nikhilesh Choudhury), Swatilekha Chatterjee (Bimala Choudhury), Jennifer Kapoor (Miss Gilby, la gouvernante anglaise), Gopa Aich (Nikhil)
Nous sommes en 1905, une époque trouble en Inde, où les grands propriétaires terriens commencent à contester la colonisation. Les Anglais profitent de l’avantage, que représente au Bengale la division des communautés hindoues et musulmanes, pour mieux asseoir leur autorité. La maison c’est le palais familial près du Gange où vit Bimila, l’épouse de Nikhil, cloîtrée selon la tradition. Cependant son mari, un libéral éclairé, ne cherche pas à la confiner dans cette vie oisive, il veut qu’elle s’ouvre vers l’extérieur, apprenne l’anglais et la musique. Un jour Nikhil lui présente Sandip, un vieil ami, devenu un leader acharné du mouvement indépendantiste. Ils incarnent deux visages de l’Inde face aux mouvements indépendantistes. Bimala est d’abord séduite par Sandip qui exerce sur elle une sorte de fascination. Elle est séduite par ses prises de position, avant de découvrir progressivement sa duplicité. Le destin des trois personnages se confond avec la réalité que traverse le pays au bord d’une rupture. Si Sandip incarne le nationalisme pur et dur, Nikhil est, en revanche, un sage qui préconise la modération en toute chose. Entre eux deux rayonne Bimala, tiraillée entre l’Amour passion ou un amour conjugal stable, entre modernité et tradition…
MRS LYER
APARNA SEN (2002, Léopard d’or et prix spécial du jury au Festival international de Locarno en 2002 et 4 distinctions au National Film Awards en 2003)
Konkona Sen Sharma (Meenaksi Lyer), Rahu Bose (Raja), Bhisham Sahni (Iqbal Ahmed Khan), Surekha Sikri (la femme d’ Iqbal Ahmed Khan
Ce film évoque le drame des conflits inter-religieux entre Hindous et Musulmans. Meenaksi Lyer, s’apprête à faire un long voyage en bus et en train avec son bébé âgé de quelques mois, pour retrouver son mari à Calcutta. Peu avant son départ elle rencontre Raja, un jeune photographe animalier, qu’un ami commun lui a présenté, et qui se rend aussi à Calcutta. Elle, est une jeune tamoule appartenant à une famille brahmane traditionnaliste, lui est musulman. Raja, étant bienveillant avec Meenasky pendant ce long voyage, rapidement les autres passagers les prennent pour un couple. Le voyage se déroule bien jusqu’au moment où le bus est arrêté par une bande d’extrémistes hindous à la recherche de musulmans qui ont brûlé leur village. Soudain les voyageurs se retrouvent plongé dans un univers violent et Meenasky comprend que Raja va se faire arrêté et massacré. Quand on leur demande leur identité elle le fait passer pour son mari et le sauve. Elle lui évite ainsi le sort d’un couple musulman qui est arrêté malgré des protestations. La situation est bloquée et étant dans l’impossibilité de repartir, les passagers cherchent un hébergement. Meenasky refusera de partager la même chambre que Raja… Les jours suivants, obligés de continuer à jouer « un couple », ils se retrouvent finalement dans un train pour Calcutta et, de cette situation troublante, naissent des sentiments confus, un impossible amour. Aparna Sen, réalisatrice et actrice, est une importante figure du cinéma bengali.